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LA PLURALITÉ DES MONDES

» Pour monstrer que cette conséquence ne est pas nécessaire, Je di premièrement que combien que haut et baz soient diz en plusieurs manières, si comme il sera dit ou second livre, toutefois, quant au propos présent, ils sont dis en une manière ou resgart de nous, si comme nous disons que une moitié ou partie du ciel est hault sus nous et l’autre est bas soubs nous.

» Mes autrement sont dis bas et hault ou regardt des chose pesantes et des légières, si comme nous disons que les pesante tendent en bas et les légières en hault.

» Je di doncques que hault et bas, en ceste seconde manière, ne sont autre chose fors l’ordenance naturèle des choses pesantes et des légières, la quelle est telle que les pesantes toutes, selon ce que il est possible, soient ou milieu des légières sans déterminer à elles autre lieu immobile…

» Je di doncques là où seroit une chose pesante et que nulle légière ne fust coniointe à elle ou à son tout, celle chose pesante ne se mouvroit, car en tel lieu, ne seroit ne hault ne bas pour ce que, tel cas estant, l’ordenance dessus dicte ne seroit pas, ne par conséquent bas ne hault ne seroient pas illuec…

» Et par ce s’ensuit clèrement que se Dieu par sa puissance créet une porcion de terre, et la metoit ou ciel où sont les estoilles ou hors le ciel, ceste terre ne auroit quelconque inclinacion à estre meue vers le centre de cest monde. Et ainsi appert que la conséquence de Aristote, devant récitée, ne est pas nécessaire.

» Après Je di que se Dieu créet un autre monde semblable à cestui, la terre et les élémens de cel autre monde seroient en lui si comme en cestui les élémens de lui.

» Mes Aristote conferme sa conséquence par une autre raison ou XVIIe chapitre, et est telle en sentence : Car toutes parties de terre tendent à un seul lieu qui est un selon nombre ; et doncques la terre de l’autre monde tendroit au centre de cestui.

» Je respon que ceste raison a pou d’aparance, considéré ce que dit est maintenant et ce que fu dit ou XVIIe chapitre, car vérité est que, en cest monde, une partie de terre ne tent pas vers un centre et l’autre vers un autre centre, mez toutes les choses pesantes de cest monde tendent à estre coniointes en une masse tellement que le centre [de pesanteur de ceste masse est uni au centre] de cest monde, et toutes sont un corps selon nombre, et pour ce ont elles un lieu selon nombre ; et se une partie de la terre de l’autre monde estoit en cestui, elle tendroit à estre coniointe à la masse de cestui et econverso*