Robert Holkot se montre très souvent fidèle disciple de Guillaume d’Ockam ; ainsi en est-il, en particulier, au sujet de la pluralité des Mondes.
Le commentaire du second livre des Sentences fournit à Robert Holkot l’occasion de discuter ce problème : Dieu savait-il de toute éternité qu’il créerait le Monde[1] ? C’est au cours de cette discussion qu’il traire de la pluralité des Mondes[2].
« Il faut parler ici, dit-il, d’une manière conforme à la foi ; je suppose, en effet, tout au moins que le pouvoir de Dieu est infini en intensité, puisque Dieu a librement créé le Monde, enfin que la bonté et la perfection du Monde sont finies.
» Cela posé, je formule trois propositions :
» Premièrement, Dieu peut faire un monde autre que celui-ci, plus parfait que celui-ci, de même espèce que celui-ci et n’ayant avec celui-ci qu’une différence numérique.
» Secondement, Dieu peut faire un monde autre que celui-ci, plus parfait et d’une autre espèce.
» Troisièmement…
» Voici comment je prouve la première proposition ; en admettant, au sujet de la puissance de Dieu, cette supposition communément reçue que Dieu peut faire tout ce qui n’implique aucune contradiction ; à partir de cette supposition, j’argumente ainsi :
« Tout ce qui n’implique pas contradiction, Dieu le peut faire ; mais la création d’un monde qui n’aurait avec celui-ci qu’une différence numérique n’implique aucune contradiction ; donc etc.
» Voici la preuve de la mineure : Ces propositions : Il existe deux soleils, il existe deux lunes, il existe deux mondes, ne sont point contradictoires. Dieu peut donc créer d’autres corps célestes qui seraient de même espèce que les nôtres et qui n’en différeraient que d’une manière numérique… »
Holkot n’ignore pas les raisons invoquées contre la pluralité des Mondes par la philosophie péripatéticienne ; ces raisons, il les réduit à trois chefs :
« Premièrement, le Monde est formé de toute sa matière ; il ne saurait donc être multiplié ; il ne peut exister des mondes multiples…