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LA ROTATION DE LA TERRE

Perspective ; et sont tels sens souvent dêceus en tel cas, sicomme il fut dit devant de celui qui est en la naif meue.

Après est monstré comment par raisons ne peut estre conclut que le Ciel soit ainsi meu.

Tiercement, ont esté mises raisons aucunes contraires, et qu’il n’est pas ainsi meu et la Terre non : Deus enim firmavit orbem Terræ qui non commovebitur.

Nonobstant les raisons au contraire ; car ce sont persuasions qui ne concludent pas évidemment.

Mes considéré tout ce que dit est, l’on pourrait par ce croire que la Terre est ainsi meue et le Ciel non ; et n’est pas évident du contraire.

Et toutes voies ce semble de prime face autant et plus contre raison naturèle comme sont les articles de notre Foy, ou tous, ou plusieurs.

Et ainsi ce que j’ay dit par esbatement en ceste matère peut valoir à confuter et reprendre ceuls qui vouldroient notre Foy par raisons impugner.


III
REMARQUES SUR L’EXPOSÉ D’ORESME


Les pages que nous venons de lire ne requièrent pas un long commentaire ; il serait difficile, en effet, de souhaiter plus d’ordre et de clarté dans les idées. Lorsque Copernic, dans son livre Sur les révolutions des orbes célestes, reprendra l’hypothèse de la rotation terrestre, ce qu’il dira en faveur de cette hypothèse sera loin d’avoir l’ampleur et la netteté du discours de Nicole Oresme.

Trois points seulement retiendront notre attention ; voici le premier :

Nous avons vu qu’aux partisans de la rotation de la terre, les adversaires de cette hypothèse, de François de Mayronnes à Albert de Saxe, n’avaient cessé d’adresser ce reproche : Elle suffît bien à « sauver » le mouvement diurne, mais elle ne suffît pas à « sauver » les autres mouvements, si compliqués, que révèle l’observation des corps célestes.

Que Nicole Oresme connaisse cette objection, nous n’en doutons pas ; nous avons vu qu’au temps où il rédigeait ses Questions sur les météores, elle l’empêchait d’admettre la rota-