Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/289

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
286
LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

Nous avons rapporté, jadis[1], ce qu’il enseignait, au sujet de la Grande Année qui, ramenant tous les astres à une même disposition, ramène, ici-bas, toute chose au même état. Sans répéter ici cet enseignement, citons un autre texte[2] où se trouve particulièrement marquée la corrélation de cette Grande Année avec les bouleversements de la surface terrestre.

Pierre nous dit, tout d’abord, qu’« au gré de Platon, le Monde a été engendré, comme on le voit dans le Timée ; en effet, commeril est dit au huitième livre des Physiques, Platon a seul admis que le temps ait eu commencement ; imbu des opinions de Moïse, il a supposé que le Monde et que les diverses espèces avaient commencé. »

Il rappelle ensuite « les opinions d’Empédocle ; celui-ci supposait que l’Univers, considéré dans toutes ses parties, était engendré et détruit successivement une infinité de fois, selon que la discorde était vaincue ou que l’amitié était dominée. »

Il ajoute enfin : « On doit dire que le Monde a eu génération et commencement ; on le doit dire à cause des transmutations si véhémentes qu’éprouve la machine d’ici-bas ; dégoûtée sans cesse de la forme dont elle est revêtue, la matière y est en perpétuelle transformation. C’est pour cette raison qu’ad viennent les déluges de feu et les déluges d’eau, les pestes et les autres grandes destructions, comme le disent le Timée et le Livre des propriétés des éléments. Ces changements ont aussi pour causes, selon l’enseignement d’Aristote, les mouvements de l’Univers, c’est-à-dire du ciel des étoiles fixes, qui contient et meut le Tout. Cela provient surtout, disent les Astrologues, du mouvement de la huitième sphère ; les constellations de cette sphère, dont le nombre est 48 selon Ptolémée, et seulement 40 selon les modernes, se meuvent d’un degré en cent ans vers l’Orient, contre le mouvement du premier mobile, de celui qui produit le mouvement diurne. Comme ce mouvement, suivant Ptolémée, est accompli en trente-six mille ans, certains Pythagoriciens ont pensé que toutes choses reviendraient, au bout de ce temps, à l’état qu’elles avaient au début de ce mouvement.

» À quoi l’on ajoutera peut-être, si l’on suppose que l’âme ést incorruptible et qu’il en est de même des étoiles : La matière par un tel mouvement, étant redevenue la même ou étant redevenue toute semblable, l’âme, qui en avait été autrefois

  1. Seconde partie, ch. X, § VI ; t. IV, pp. 238-239.
  2. Petri Aponensis Op. laud., particula X, problema XIII ; éd. cit., fol. 103, col. a.