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L’ÉQUILIBRE DE LA TERRE ET DES MERS. — II


VI
l’équilibre de la terre et des mers
selon albert de saxe


Au temps d’Oresme et de Buridan, tous les physiciens n’étaient pas de cet avis ; certains, prof essaient une opinion plus raisonnable touchant l’indissoluble lien qui existe entre l’équilibre de la terre et l’équilibre des mers ; Albert de Saxe va nous l’apprendre.

La sphéricité de la terre a longuement préoccupé Albert de Saxe ; de cette sphéricité, il donne, comme Aristote, des preuves de fait et une raison mécanique. Les preuves de fait ne diffèrent de celles qu’apportait le Stagirite que par une brève addition ; mais cette addition qu’aucun auteur n’avait encore formulée, du moins à notre connaissance, mérite d’être citée.

Comme Aristote, Albert de Saxe avait dit[1] : « La terre est ronde du Nord au Sud. On le prouve : Si un voyageur s’avance suffisamment du Sud vers le Nord, il voit le pôle s’élever sensiblement ; cele ne peut provenir que du renflement présenté par la terre entre le Nord et le Sud. »

À cette preuve, il ajoute la remarque suivante :

« Au sujet de cette conclusion, il faut savoir qu’ôn peut déterminer par l’expérience si la terre est ronde, du moins du Sud au Nord. Qu’un observateur, partant d’un certain lieu, se déplace vers le Nord jusqu’à ce que le pôle lui semble d’un degré plus élevé qu’auparavant, et qu’il mesure le chemin parcouru. Cela fait, qu’il revienne à son point de départ et que, partant de ce lieu, il se dirige vers le Sud jusqu’à ce que le pôle lui paraisse d’un degré moins élevé qu’il n’était au lieu marqué comme point de départ ; qu’il mesure de nouveau le chemin parcouru. Si ces deux chemins se trouvent être égaux, c’est un signe certain que la terre est circulaire du Nord au Sud ; si, au contraire, il se trouvait qu’ils ne fussent point égaux, ce serait un signe que la terre n’est pas ronde du Nord au Midi. — Juxta istam conclusionem est sciendum quod isto modo posset experiri quod terra est rotunda saltem inter meridiem et septen-

1. Alberti de Saxonia Subfilissimæ quæstiones in libros de Cælo et Mundot lib. II, quæst. XXVII. — Cette question est la XXVe dans les éditions données à Paris, en 1516 et 1518, où deux questions manquent au second livre.

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