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L’ÉQUILIBRE DE LA TERRE ET DES MERS. — I

Si cette explication finaliste n’avait pas l’aveu de Duns Scot, elle avait du moins celui de certains de ses plus illustres disciples ; tel François de Mayronnes.

En commentant le second livre des Sentences, François de Mayronnes déclare[1] que « le volume du feu est dix fois le volume de l’air, car, en chacun d’eux, il a été mis même quantité de matière, tandis que la rareté du feu est décuple de celle de l’air. » Puis il poursuit en ces termes :

« Pourquoi l’eau n’enveloppe-t-elle pas la terre, puisqu’elle doit être sphérique ? On répond que, naturellement, il en serait ainsi. Mais en vue de l’habitation des animaux, Dieu a dit : Que toutes les eaux se rassemblent en un même lieu. » La même théorie purement finaliste suffit à contenter Nicolas de Lyre.

Né à Neuve-Lyre (Eure) vers 1270, juif converti au Christianisme, Nicolas était, en 1291, franciscain à Verneuil ; il mourut à Paris, dans le grand couvent des Franciscains, le 14 octobre 1349. Il a composé, sur toute l’écriture Sainte, des Commentaires exégétiques (Postillæ) et des Réflexions morales (Moralia) qui, au Moyen-Âge et au temps de la Renaissance, ont connu la plus grande vogue et joui de la plus forte autorité.

Or, dans les Postillæ de Nicolas de Lyre sur le premier chapitre de la Genèse, nous lisons[2] :

« Ici vient la description de l’œuvre du troisième jour ; ce jour-là, les éléments ont été distingués les uns des autres.

» Cette distinction a été accomplie d’abord par ceci que l’eau, précédemment produite en sa forme substantielle, a maintenant reçu de Dieu la densité qui lui est due, qu’elle a occupé un moindre volume, laissant place à l’air ; puis par ceci que, par la vertu de Dieu, la terre a été creusée de concavités qui ont reçu une partie des eaux ; une partie de la terre s’est ainsi montrée à découvert, en vue de l’habitation de l’homme et des animaux.

1. Francisci de Mayronis Scripta in quatuor libros Sententiarum, lib. II, dist. XIV, quæst. V. Venetiis Impensa Heredum quondam domini Octaviani Scoti Modoetiensis ac Sociorum. 24 April. 1520 ; fol. 150, col. d.

2. Biblia sacra cum glosa ordinaria. Primum quidem a Strabo Fuldensi monacho Benedictino : Nune verô novts Patrum, cum Græcorum tum Latinorum explicationibus locupletata et Postula Nicolat Lyrani Franciscani, nec non additionibus Pétri Burgensis Episcopi, et Matthiæ Thoringi replicis, opéra et studio Theologorum ’Duacensium diligentissime emendatls. Tomis sex comprehensa. Duaci, Excudebat Baltazar Bellerus suis et Ioannis Klerbergii Antverpiensîs sumptibus. Anno MDCXVII. T. I, col. 14.

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