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L’ÉQUILIBRE DE LA TERRE ET DES MERS. — I

de tous côtés par l’air et l’air par le feu. En effet, suivant Aristote, chacun des éléments est le lieu d’un autre élément, c’est-à-dire que la partie ultime du premier est le lieu du second ; la partie ultime du feu, par exemple, est le lieu de l’air, et ainsi des autres.

» On demande également si la mer se trouve, en quelque endroit, plus élevée que la terre.

» À cela nous répondrons : Selon la forme qui est due aux éléments, il faudrait que la terre fût entièrement contenue par l’eau, comme il en est pour les autres éléments. Mais le Monde ne serait pas parfait s’il n’existait pas des animaux à sang chaud et des plantes qui ne peuvent subsister dans l’eau. Aussi une partie de la terre est-elle non couverte par l’eau, afin que les animaux les plus nobles soient conservés en vue de la perfection de l’Univers. Là se rencontre le corps le plus apte et le mieux préparé à la génération. Aussi y a-t-il, sur terre, plus d’espèces d’animaux qu’en mer, et un plus grand nombre d’animaux. »

Comment la terre ferme se trouve très apte à la génération des mixtes et, en particulier, des êtres vivants, Michel Scot l’avait dit un peu auparavant[1] : « Aristote écrit, au premier livre des Météores et au quatrième, que là où l’air est en continuité avec la terre, là aussi se trouve le lieu le plus convenable et le plus apte à la génération ; c’est là que sont engendrées le plus grand nombre d’espèces d’animaux et de végétaux. »

De même, il s’était élevé[2] contre l’affirmation qui déclare la mer plus élevée que la terre : « Il faut dire que l’eau est au-dessus de la terre s’il s’agit de la nature universelle de l’eau, qui est un élément simple, et non point de l’eau composée… Ou bien encore on dit que l’eau est au-dessus de la terre parce que la majeure partie de la terre est recouverte d’eau. »

De l’existence de la terre ferme, Michel Scot ne nous donne qu’une raison, et c’est une cause finale : l’eau doit laisser à découvert une partie de la terre pour rendre possible la vie des animaux à sang chaud et des végétaux aériens.

Cette explication purement finaliste est aussi la seule que donne Campanus de Novare.

  1. Michaelis Scoti Op. laud., au chapitre commençant par ces mots : Universalis Mundi machina.
  2. Michaelis Scoti Op. laud. au chapitre commençant par ces mots : Iterum quæritur utrum ignis in sua sphæra sit calidus.