« Par ses deux mouvements, le ciel étoilé représente ces deux sciences, [la Physique et la Métaphysique]. Le mouvement par lequel, chaque jour, il tourne et accomplit de point en point sa circulation, représente les choses naturelles corruptibles qui, quotidiennement, arrivent au terme de leur route, et dont la matière se change de forme en forme ; c’est de ces choses là que traite la Physique. Par le mouvement presque insensible, d’un degré en cent ans, qu’il fait d’Occident en Orient, il représente les choses incorruptibles, qui, de Dieu, ont reçu commencement par création et n’auront point de fin ; c’est de celles-ci que traite la Métaphysique. Je dis que ce mouvement représente ces choses, car sa circulation a eu commencement et n’aura pas de fin ; la fin d’une circulation, c’est le retour au même point ; et par ce mouvement, dont un peu plus de la sixième partie est accomplie depuis le commencement du Monde, ce ciel ne retournera jamais au même point ; car nous sommes déjà au dernier âge du siècle, et nous attendons en vérité la consommation du mouvement céleste. »
Le mouvement diurne était, au gré de Platon, le mouvement de l’essence d’identité, tandis que les mouvements suivant l’écliptique appartenaient à l’essence du différent ; Aristote voyait, dans le premier mouvement, une cause d’éternité et de permanence, dans les seconds, les principes des générations et des corruptions. Ces pensées avaient séduit maint docteur chrétien, entre autres Saint Thomas d’Aquin. Mieux que ces docteurs, Dante a compris tout ce qu’elles renfermaient de païen ; il a mieux vu à quel point elles impliquaient croyance en l’éternité du Monde ; et il leur a imposé une audacieuse transformation. Pour lui, le mouvement diurne n’est plus le principe d’identité, la cause de pérennité ; il est devenu le symbole de la vio éphémère des choses qui naissent et meurent autour de nous. Le mouvement propre du huitième ciel est celui que les Platoniciens du Moyen Âge prenaient volontiers comme mesure de la Grande Année, celui au terme duquel le Monde, reprenant exactement la disposition qu’il avait au commencement, se préparerait à parcourir une nouvelle période de sa vie perpétuelle. Pour Dante, ce mouvement est essentiellement celui dont, le Monde ne verra pas la fin.
Au poëme du Paradis, Dante n’invoque les enseignements de l’Astronomie que sous une forme extrêmement générale.
Il y fait, tout d’abord, allusion[1] au Ciel empyrée, dans la concavité duquel tourne le ciel le plus rapide, tandis que la Provi-
- ↑ Dante Alighieri, Il Paradiso, I, 121-123.