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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — II. LES PHYSICIENS

centre de ce ciel, l’existence d’un corps immobile ; au Philosophe, il objecte[1] cet argument :

« Item, contre ccste response et au propos principal, est en ciel instance manifeste ; car pour sauver les apparences et les expériences des mouvemens du ciel, il convient de nécessité confesser que, ou ciel, sont aucuns corps cclestiels spériques appelez espiciclcz, et que chascun tel espicicle a mouvement circulaire, propre par soy, environ son centre, autre que le mouvement du ciel en quoy est espicicle ; et appert clèrement que c’est impossible selon philosophie que quelconque corps repouse au milieu de cest espicicle. Et doncques il ne convient pas que aucun corps repose ou milieu de corps meu circulairement. »

Ln dernier passage concerne la sphère suprême chargée de communiquer le mouvement diurne à tous les orbes, tandis que la sphère des étoiles fixes se meut elle-même et meut les orbes des astres errants d’un mouvement très lent. Ce passage est surtout intéressant en ce que nous y voyons Nicole Oresme adopter une opinion qu’avait soutenue Jean Buridan. Il se lit au XIXe chapitre du second livre du Traité du Ciel et du Monde ; le voici[2] :

« Ou temps d’Aristote l’on n’avoit appercu encor que la VIIIe espère, où sont les estoilles fichiés, feust meue d’autre mouvement que de journal, et pour ce, tenoit Aristote que c’estoit le souverain ciel meu très ysnelment[3] d’un seul mouvement très simple,

» Mez depuis a esté trouvé quelle est meue de mouvement composé de plusieurs, et pource les astrologiens mettent que, par dessus elle, est une IXe espère…

» Mes autrefois j’ay advisé une oppinion telle que, jà soit-ce que la VIIIe espère soit meue de deux mouvemens, par aventure ne convient-il pas, pour ce, mettre une espère par dessus elle, en laquelle ne appert quelconque estoille : mes peut-estre que la VIIIe est la souveraine, et qu’elle et les autres sont meues de mouvemen journal, mes les autres en descendant de leurs mouvement propres comme est dit.

» Et sont meues[4] toutes selon l’autre mouvement de celle VIIIe espère, qui est, selon aucuns, en cent ans d’un degré contre le mouvement journal. »

  1. Ms. cit., fol. 50, coll. c et d.
  2. Ms. cit., fol. 81, col. c ; fol. 82, col. a.
  3. Ysnelment = vite.
  4. Le ms. porte : « : Et ne sont pas meues… » ; nous croyons à une erreur du copiste.