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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


retrouvons les traces au De mundi cælestis terrestrisque constitutione liber ?

L’école astronomique arabe dont Ibn Tofaïl était le chef, dont Averroès et Al Bitrogi sont les seuls disciples de nous connus semble donc, dans sa lutte contre l’Astronomie de l’Almageste, s’être surtout inspirée d’écrits produits par la Science hellène.

Le Pseudo-Bède puisait sa science astronomique à des sources diverses ; quelle source a fourni les connaissances que nous venons de rapporter, c’est ce que nous n’avons pu découvrir ; nous serons plus heureux au sujet de la doctrine que nous allons exposer.

Platon, dit notre auteur plaçait le Soleil immédiatement au-dessus de la Lune ; Cicéron, à la suite des Chaldéens, plaçait Vénus et Mercure entre la Lune et le Soleil ; « toutefois, nous ne nierons pas que Vénus et Mercure se trouvent parfois au-dessous du Soleil, ce que l’histoire même nous apprend ; on lit, en effet, dans l’Historia Caroli, que Mercure apparut pendant neuf jours sur le Soleil, semblable à une tache ; des nuages ont empêché de noter le temps de son entrée et de sa sortie ».

L’observation empruntée aux chroniques du règne de Charlemagne est erronée ; elle ne peut s’appliquer à un passage de Mercure devant le disque solaire ; elle s’expliquerait d’une manière sensée par la présence sur ce disque d’une tache assez grande pour être vue à l’œil nu, comme il en a été maintes fois observé [1]. Un passage de Mercure sur le disque solaire eût d’ailleurs prouvé le contraire de l’assertion qu’avance le Pseudo-Bède ; cette assertion n’en demeure pas moins ; Vénus et Mercure sont tantôt au-dessus du Soleil, tantôt au-dessous.

Cette assertion, d’ailleurs, il la précise [2] : « Que Vénus et Mercure se trouvent tantôt au-dessus du Soleil et tantôt au-dessous, on le peut montrer de trois manières par des conjectures [géométriques ] ; on en peut rendre compte, tout d’abord, par des intersections de cercles ; on en peut rendre compte, ensuite, en admettant l’existence à’épicycles^ c’est-à-dire de surcercles, qui n’ont point la Terre pour centre, mais qui prennent, en quelque sorte, le Soleil pour centre de leur course ; enfin, on peut imaginer que la trajectoire de chacune de ces planètes s’écarte du cercle du Soleil, en s’approchant et s’éloignant de la Terre, et en décrivant des arcs alternativement concaves et convexes, analoe-nes à ceux

1. Bède le Vénérable, loc. cit., col. 88g : De ordine planetarum.

2. C’est l’interprétation proposée par Riccioli (J. B. Riccioli Almagestam novum, tomi I pars posterior, p. 278, col. a. Bononiæ, MDCL1).

3. Bède le Vénérable, loc. ctl,, col. 8go : Deepicyclis et intersectis.

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