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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


aussi, s’écarte au maximum de l’axe du Monde là où elle rencontre l’équateur ; elle se resserre vers l’axe du Monde dans les régions qui approchent des pôles ; c’est encore ce que veut exprimer notre auteur lorsqu’il écrit ceci : « À l’image du firmament, la sphère du Soleil est plus écartée [de l’axe du Monde] en certaines régions et plus contractée [vers cet axe] en certains autres ; elle est plus écartée sous le cercle équinoxial et plus contractée sous les tropiques ; le cercle décrit [quotidiennement] par le Soleil serait, en effet, plus voisin du firmament sous les tropiques que sous l’équateur, s’il ne s’élargissait sous l’équateur et ne se contractait sous les tropiques, et cela à la similitude du firmament ».

À cette affirmation, le Pseudo-Bède prévoit cette objection : « Si le cercle quotidien du Soleil se trouve plus contracté sous les tropiques, le Soleil y produira des jours plus courts, car il devra parcourir un chemin plus court ; sous l’équateur, les jours solaires seront plus longs, car le chemin parcouru par le Soleil sera plus long ».

Voici la « solution » de cette difficulté : « Plus un corps est éloigné de la partie renflée [c’est-à-dire de la région équatoriale] du firmament, moins il ressent l’impulsion qui en émane. Lorsque le Soleil se trouve sous les tropiques, il ressent une moindre impulsion que lorsqu’il se trouve sous l’équateur ; lorsqu’il est sous l’équateur, la vitesse plus grande que lui imprime la force de l’impulsion compense la longueur du chemin. »

La théorie dont le Pseudo-Bède vient de nous tracer une ébauche se rapproche de la doctrine de Cléanthe, telle que nous l’a fait connaître un court passage de Stobée1. Elle s’en rapproche en ce qu’elle regarde le mouvement du Soleil suivant une courbe spirale comme un phénomène premier, irréductible, et non comme le mouvement résultant de deux rotations. Elle attribue, en outre, ce mouvement à une impulsion émanée du ciel suprême, comme le fera Al Bitrogi ; mais elle suppose que cette impulsion, au lieu d’émaner de la totalité de la dernière sphère et de s’atténuer seulement par l’effet de la distance a cette sphère, provient de la région équatoriale du ciel des étoiles et varie en raison de la proximité plus ou moins grande à cette région.

La théorie dont s’inspire l’auteur du Livre de la constitution du Monde s’efforçait aussi d’expliquer les inégalités du mouvement des planètes ; le passage suivant nous en est témoin : « Macrobe

1. Joannïs Stobæi Eclogai’um physicarum et ethicarum libi’i duo. Recensuit Augustus Meineke. Lib. I, Physica, cap. XXV ; vol. I, p. 1^5 ; Leipzig, 1860. — Voir : Première partie, ch. XI, § Vil ; t. Il, p. 167.