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LE SYSTÈME D’HÉRACLIDE AU MOYEN ÂGE

Cette doctrine de l’unité de l’intelligence paraît avoir, de très bonne heure, exercé ses séductions au sein de la Chrétienté latine. Le ixe siècle vit une tentative d’Averroïsme avant Averroès [1] ; le moine hibernais Macarius Scotus semble en avoir été l’initiateur ; l’Hibernie et l’abbaye de Corbie paraissent avoir été les principaux théâtres de la lutte.

La lecture de Macrobe a fort bien pu susciter l’hérésie de Macarius Scotus ; Macrobe aurait donc été connu en Écosse dès le ixe siècle ; de là, par l’intermédiaire de l’abbaye de Corbie, la connaissance du Commentaire au Songe de Scipion se serait répandue dans les écoles du continent. On ne saurait s’étonner que ce rôle d’initiateur de l’Europe au Néo-platonisme fût tenu par le pays auquel nous devons Jean Scot.

L’influence de Macrobe ne se bornait pas à suggérer aux Latins des opinions hérétiques sur l’unité de l’intelligence humaine ; elle orientait également leurs connaissances astronomiques ; en concordance avec les enseignements de Chalcidius et de Martianus Capella, elle les portait à recevoir la théorie d’Héraclide du Pont touchant les mouvements de Vénus et de Mercure.

VI

Helpéric

Le premier astronome qui s’avouera disciple de Macrobe, c’est Helpéric.

Quel était cet Helpéric ?

Fabricius mentionne divers Helpéric ; celui dont nous allons parler était, dit-il [2], moine bénédictin de Saint-Gall ; il aurait écrit, vers 980, un traité de Comput ecclésiastique. Trittenheim, qui le qualifie d’astronome, de philosophe et de poète, le fait vivre plus tard, soit vers 1040, soit, dans d’autres écrits, vers 1080.

Casimir Oudin, dans sa Dissertation sur les écrits de Bède le Vénérable, rapporte [3] l’opinion émise par le jésuite Pierre-François Chifflet ; celui-ci citait, en 1656, dans ses Scriptores veteres de

1. Ernest Renan, Averroès et VAverroïsme ; essai historique ; pp. 101-102 ; Paris, i852.

2. Fabricii Bibliotheea latina mediœ et injimœ œtatis, t. IIÏ, p. 188,

3. Bedæ Venerabilis Opéra omnia. Accurante J. P Migne. T. I. (Patrologiœ latinœ t. XC), col. 77.

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