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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


l’église de Liège, puis évêque d’Utrecht, écrit [1] à Silvestre II une lettre au sujet de questions, géométriques que suggère la lecture de Macrobe.

Le Commentaire au Songe de Scipion est donc, dès la seconde moitié du xe siècle, d’usage courant auprès des écolâtres latins. La faveur en laquelle les Scolastiques tenaient cet ouvrage ne fit assurément que croître au cours du xie siècle. Les esprits curieux de Science profane lisaient avidement cette compilation où se trouvaient réunies des opinions que l’auteur avait empruntées aux divers sages de l’Antiquité et qu’il avait plus ou moins fidèlement rapportées. Cette ardeur à s’enquérir de l’avis des philosophes païens n’était pas sans inquiéter gravement les chrétiens soucieux d’orthodoxie et sévères à l’égard des opinions hérétiques.

Manégold était de ce nombre.

Né vers 1060, Manégold fut élevé à Lutenbach, près Guebwiller ; en 1086, on le trouve en Bavière, où il devient doyen de Raitenbuch ; vers 1090, il revient en Alsace, où il fonde l’abbaye de Marbach ; en 1103, il est abbé de ce monastère.

Partisan convaincu de Grégoire VII, Manégold joua un grand rôle dans l’œuvre de réforme accomplie par ce pape.

On possède, de Manégold, un opuscule [2] écrit contre Wolfelm de Cologne ; Muratori a publié cet écrit.

La cause qui a engagé Manégold à écrire cet opuscule est une conversation qu’il avait eue, autrefois, à Lutenbach, avec Wolfelm. Les idées développées par Macrobe dans son Commentaire au Songe de Scipion avaient été le principal sujet de cette conservation [3]. « J’ai connu de vous-même l’aveu de votre maladie, en vous adjurant de me dire si votre intelligence se fiait à ces opinions, au point de penser qu’elles ne continssent rien que les croyants eussent à condamner… Aussi, je me propose de vous écrire à ce sujet, afin qu’en ces livres et dans ces avis dont vous cachez l’erreur, vous reconnaissiez manifestement la dépravation hérétique qu’ils contiennent ».

Ce que Macrobe a écrit de la sphère céleste, des orbes des planètes, de l’harmonie astrale, de la mesure de la Terre, du Soleil et de la Lune, éveille la méfiance de Manégold [4] ; en particulier,

1. Gebbebti Opéra mathematica, p. 3oa.

2. Magistri Manegaldi Contra Wolfelmum Coloniensem opusculum (Anec~ dota guœ ea ? Ambrosianœ bibliothecœ codicibus nunc primum eruit Lunovicus Antonius Mubatorius. Tomus quartus, pp. 108 sqq. Neapoli, MDCCLXXVI. Typis Gajetani Castellani).

3. Manegaldi Opusculum… Proœmium ; toc. cit.t p. 109.

4. Manegaldi Opusculum… Cap. lV : Quod in mensurando Solem, et Lunam,

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