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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


que chacun de ces astres ait deux sphères propres, que les sphères creuses des trois astres, animées de la même vitesse, parcourent dans le même temps, d’un mouvement rétrograde, la sphère des étoiles fixes, et que les sphères pleines [les épicydes] aient toujours leurs centres sur la même ligne droite [issue du centre du Monde], la sphère pleine du Soleil étant la plus petite ; celle de Mercure étant plus grande, et celle de Vénus encore plus grande.

» Il se peut aussi qu’il n’y ait qu’une seule sphère creuse commune aux trois astres et que les trois sphères solides [les trois épi cycles], contenues dans l’épaisseur de celle-là, n’aient qu’un seul et même centre ; la plus petite serait la sphère vraiment pleine du Soleil, autour de laquelle serait celle de Mercure ; viendrait ensuite, entourant les deux autres, celle de Vénus qui achèverait de remplir l’épaisseur de la sphère creuse commune…

» On comprendra que cette position et cet ordre sont d’autant plus vrais que le Soleil essentiellement chaud est le foyer du Monde, en tant que Monde et animal, et pour ainsi dire le cœur de l’Univers, à cause de son mouvement, de son volume et de la course commune des astres qui l’environnent.

» Car dans les corps animés, le centre du corps, c’est-à-dire de l’animal, en tant qu’animal, est différent du centre du volume. Par exemple, pour nous qui sommes, comme nous Favoris dit, hommes et animaux, le centre de l’être animé est dans le cœur toujours en mouvement et toujours chaud, et à cause de cela, source de toutes les facultés de l’âme, cause de la vie et de tout mouvement local, source de nos désirs, de notre imagination et de notre intelligence. Le centre de notre volume est différent ; il est situé vers l’ombilic.

» De même, si l’on juge des choses les plus grandes, les plus dignes et les plus divines, par comparaison avec les choses les plus petites, qui sont fortuites et périssables, le centré du volume du Monde universel sera la Terre froide et immobile ; mais le centre du Mondé, en tant que Monde èt animal, sera dans le Soleil, qui est en quelque sorte le cœur de l’Univers, et d’où l’on dit que l’Âme du Monde prit naissance pour pénétrer jusqu’aux parties extrêmes. »

« La Lune étant la planète la plus rapprochée de la Terre, dit Théon en un autre endroit1, peut passer devant tous les autres

1. Théon de Smyrne, Astronomie, c. XXXVII) éd. Th. H. Martin, pp* 3io- 3i3 ; éd. J. Dupuis, pp. 3io-3i3.