Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/523

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
516
L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


avec Bacon, d’expliquer comment, si le trou est très petit, la tache est semblable à l’objet lumineux ?

La démonstration géométrique qui vient aussitôt après est peu faite pour fixer cette indécision. Elle consiste en une construction de pénombre au cours de laquelle les dimensions du trou ne sont pas traitées comme négligeables ; puis, cette remarque y est introduite : « Si les rayons qui se coupent dans le trou étaient prolongés en droite ligne à une distance du trou égale à celle où le Soleil se trouve de l’autre côté, il est clair qu’ils se dilateraient jusqu’à la grandeur du Soleil. » Cette remarque, dont le sens exige que le trou se réduise à un point, est empruntée à Bacon, tandis que les constructions qui la précédaient s’inspiraient de Witelo.

Mais Peckham n’a pas seulement étudié Bacon et Witelo ; sûrement, il a lu l’ouvrage anonyme que nous venons d’analyser ; c’est cet ouvrage qui va le conseiller dans ce qu’il s’apprête à nous dire de la chambre noire ; en effet, il poursuit en ces termes :

« De la rondeur de la figure dessinée par les rayons incidents, divers auteurs ont proposé des causes diverses.

» Il en est qui attribuent uniquement cet effet à la rondeur du Soleil ; de même, disent-ils, que les rayons procèdent du Soleil, de même leur rondeur provient de sa rondeur. Cette conjecture leur est fournie par les éclipses de soleil ; en effet, au temps d’une éclipse de soleil, que les rayons solaires soient reçus par un trou quelconque dans un lieu obscur ; on verra que la base de la pyramide lumineuse est écornée par une ombre, et cela dans le rapport où la Lune recouvre le Soleil. — Et hujus rei conjectural ex solis eclipsibus sumunt ; quando enim, lempore eclipsis solis, in loco tenebroso per quodcunque foramen radii Solis excipiuntur, est videre basim pyramidis illuminationis corniculatim ea ratione obumbrescere, qua Solem Luna legit.

» D’autres, examinent la question avec plus de subtilité ; sans doute, ils regardent la rondeur du Soleil comme une cause, mais comme une cause éloignée ; la cause prochaine est, pour eux, l’intersection des rayons. » Il développe alors des considérations géométriques où se reconnaît aisément la marque de Witelo ; mais il marque clairement que ces considérations ne suffisent pas à expliquer pleinement les effets produits par la chambre noire. « Cette construction aurait encore lieu de s’appliquer si la figure du Soleil était absolument carrée… La rondeur du Soleil ne serait donc nullement cause de cette tache ronde produite par l’incidence des rayons. Mais que l’intersection des rayons, dont nous venons de parler, tout en contribuant en quelque chose à cette rondeur de la