Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/49

Cette page n’a pas encore été corrigée
42
L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


l’occasion de la création des anges [1] et de celle du firmament [2].

En dépit de l’admiration qu’il a pour Saint Jean Damascène, Pierre Lombard n’en invoque pas l’autorité dans ces questions qui touchent à la Cosmographie ; Saint Jérôme, Saint Augustin et, surtout, Bède le Vénérable sont les auteurs auxquels il se réfère.

Ce qu’il emprunte à ces auteurs, c’est, presque textuellement, ce que Hugues de Saint Victor leur avait emprunté.

Au-dessus de tous les autres cieux, se trouve l’Empyrée, ciel invisible qui ne doit pas son titre à l’ardeur du feu, mais à la splendeur de la lumière ; là, les anges ont été créés.

Le firmament a, sans doute, été formé aux dépens des eaux ; il a pris la dureté et la transparence de la pierre qu’on nomme cristal. Au-dessus de ce firmament, se trouvent des eaux. Comment y sont-elles retenues ? Comment ne tombent-elles pas icibas ? Celui qui sait retenir les eaux en l’air grâce à la ténuité des vapeurs ne peut-il aussi les retenir au-dessus du firmament, non plus sous forme de vapeurs, mais sous forme de glace solide ? On peut d’ailleurs, si l’on préfère, souscrire à l’avis de Saint Augustin ; selon cet avis, les eaux célestes sont retenues loin du centre du monde sous forme de vapeurs et de gouttelettes.

Nous retrouvons, dans ces pensées de Pierre Lombard, la trace bien manifeste de l’influence exercée par Isidore de Séville et par Bède le Vénérable ; d’ailleurs le Maître des Sentences se réfère à l’opinion que Bède a exprimée, au sujet de la création du firmament, dans son écrit : In principium Genesis usque ad natimtalem Isaac et ejectionem Ismaëlis libros tres ; et l’opinion que le Moine de Wearmouth a soutenue dans cet écrit n’est point différente de celle qu’il a professée dans son De natura rerum liber.

Le peu d’originalité des doctrines cosmographiques de Pierre Lombard, la très minime importance qu’elles ont dans l’œuvre de ce docteur, nous eussent permis de les passer sous silence. Mais les quatre livres des Sentences seront, au Moyen Âge, le sujet d’innombrables commentaires ; et, bien souvent, dans la discussion des passages que nous venons de résumer, les maîtres de la Scolastique trouveront ou prendront occasion d’exposer leurs doctrines astronomiques.

Les Sentences de Pierre Lombard prolongent jusqu’à la seconde moitié du xiie siècle la suite des ouvrages qui ont puisé la Science

1. Petri Lombardi, epescopi Parisiensis, Sententiarum liber secundus, âist. U ; Ubi angeli moi creati fuerint ; in empyreo scilicet, quod statim factum repletum est angelis.

2. Petri Lombardi Op. laad>f lib. II, dist. XIV : De opéré secundæ diej, qua factum est firmamentum.

  1. 1
  2. 2