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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS


t-il des lieux habitables sous l’équateur ? Y a-t-il des lieux habitables dans l’hémisphère austral ? Non seulement, à propos de chacune de ces deux questions, les raisons qui tendent à l’affirmative et les raisons qui appuient la négative sont, la plupart du temps, les mêmes dans l’Opus majus et dans le traité anonyme ; mais encore les phrases de celui-ci se reconnaissent parfois dans celui-là.

Voici, par exemple, une raison d’autorité que font également valoir les deux ouvrages en faveur de cette opinion : La région de la terre qui se trouve sous l’équateur est habitable :


opus majus[1].                    traité anonyme[2]             
  Atque Avicenna docet Io de animalibus, et primo artis médicinæ quod locus ille est temperatissimus. Et propter hoc theologi ponunt his diebus, quod ibi sit paradisus.   Avicenna libro de animalibus et primo artis medicine dicit habitationem [esse] sub equinoctiali circulo. Hoc etiam dicunt theologi quod ibi sit locus amenissimus, scilicet paradisus terrestris.


Cette citation de l’Opus majus est, précisément, une de celles que Pierre d’Ailly devait insérer en son De imagine mundi, celle qu’en marge d’un exemplaire de ce dernier ouvrage, devait relever la main de Christophe Colomb ou de son frère Barthélemy Colomb.

Contre la possibilité d’habiter sous l’équateur, nos deux auteurs font également valoir la même raison : Deux fois par an, les habitants recevraient les rayons solaires perpendiculairement sur leur tête.

Au delà de l’équateur, dans l’hémisphère austral, l’homme peut-il habiter, la vie peut-elle se maintenir ? Les réponses à cette question sont encore extrêmement semblables dans nos deux écrits, et ces réponses semblables sont souvent formulées en des termes analogues. Voici, par exemple, le premier argument que l’auteur anonyme invoque en faveur de l’affirmative[3] ; c’est un argument que Bacon a mentionné à deux reprises[4].

  1. Rogeri Bacon Opus majus, Pars quarta, Dist. IV, cap. IV ; éd. Jebb, pp. 82-83 ; éd. Bride es. vol. I, p. 130.
  2. Ms. P, fol. 185, col b. — Cf. ms, B, fol. b, col. a, où le passage est quelque peu paraphrasé.
  3. Ms. P, fol. 185, col. b et c ; ms B, fol. 6, col. b.
  4. Rogeri Bacon Opus majus. pars Va ; éd. Jebb, p. 185 et p. 193 ; éd. Bridges, vol. I, p. 294 et p. 307.