Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/474

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
467
L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS


des histoires très fidèles et auxquelles on ne peut contredire, il s’est écoulé à peu près six mille cinq cents ans, il s’ensuit qu’à l’égard du Bélier et des autres signes [de la neuvième sphère], la disposition des planètes diffère par soixante-quatre degrés de ce qu’elle était au commencement. Cela posé, on voit chanceler presque tout ce qu’affirment les mathématiciens et les astronomes.

» Albatégni, dit-on, a prouvé qu’en cent ans, les planètes se meuvent de plus d’un degré en sens contraire du firmament. Macrobe, auquel on n’est point tenu de se fier à ce sujet, a pensé que la Grande Année de leur révolution complète s’achevait en quinze mille ans. »

Ailleurs, notre auteur définit[1], pour chaque planète, la tête et la queue du dragon, c’est-à-dire le nœud ascendant et le nœud descendant en lesquels la trajectoire de cette planète coupe l’écliptique. « Il y a donc autant de dragons, de têtes et de queues, qu’il il y a d’astres errants, fors le Soleil ; c’est-à-dire qu’il y en a six. Mais peut-être bien que cette supposition ou assertion des astronomes n’a rien de fixe et d’éternel ; en effet, comme nous l’avons dit, les sphères des planètes déplacent leur mouvement d’un degré en cent ans ; par là, depuis le commencement de leur mouvement, les auges et les opposés des auges n’ont pas cessé de changer, bien que plusieurs années ne suffisent pas à constater cette variation ».

Enfin, nous lisons plus loin[2] cette déclaration très nette :

« Il y a trois sortes de mouvements qui sont communs à toutes les planètes. Le premier est le mouvement d’Orient en Occident, qui accompagne le mouvement de la sphère des étoiles. Le second est le mouvement d’Occident en Orient, regardé par Al Fergani, Ptolémée et les autres comme celui qu’elles éprouvent au sein de leurs sphères respectives, autour de leurs axes propres et sur leurs centres particuliers. Il en est encore un troisième, qui est le mouvement des sept sphères, d’Occident en Orient, sur l’axe de l’écliptique ; par ce mouvement, elles se meuvent, avec la sphère des étoiles fixes, d’un degré en cent ans, selon ce qu’a prouvé Ptolémée. Toutefois, comme nous l’avons rappelé précédemment, Albatégni paraît avoir été d’un autre sentiment. Par ce mouvement, il advient que, pour chaque planète, l’auge, ainsi que la tête et la queue du dragon, change [d’un degré] en cent ans. »

Si l’auteur de la Somme n’accorde au système de l’accès et du recès que deux mentions sommaires où tout n’est pas exact, il

  1. Lincolniensis Summa, Cap. CCXXVIII ; éd. Baur, p. 570.
  2. Lincolniensis Summa, Cap. XXI ; éd. Baur, p. 575.