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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


premier de ces deux systèmes doit être exclu, ce qui entraîne la nécessité d’adopter le second.

« De l’avis de tous ceux qui parlent raisonnablement de cette question, il n’y a, dit-il, que deux moyens de sauver les apparences précédemment énumérées.

» Le premier de ces moyens est celui dont Averroès touche quelques mots au XIIe livre de la Métaphysique ; il y déclare que la véritable Science des astres est fondée sur des principes de Physique qui détruisent la possibilité des excentriques et des épicycles ; il ajoute qu’on peut sauver les apparences au moyen d’un orbe unique mû sur des pôles multiples, de telle sorte que son mouvement soit composé de plusieurs autres ; il confesse, d’ailleurs, qu’il n’est pas en état de développer cette Astronomie.

» Alpétragius suivit Averroès et, peut-être, fut-il excité dans sa recherche par les propos de ce dernier ; des racines plantées par Averroès il sut tirer des rameaux auxquels il fit porter de belles fleurs et de beaux fruits, du moins au jugement de quelques-uns. ».

Ce discours, nous nous souvenons de l’avoir lu vers la fin des Communia naturalium de Roger Bacon, dans un des chapitres qui proviennent, croyons-nous, de l’Opus minus ; la ressemblance devient saisissante entre le langage de Bacon et le langage de Bernard de Verdun si nous avons soin de rapprocher ces deux langages en les laissant revêtus de leur forme latine.

Voici, d’abord, la page écrite par Roger Bacon aux Communia naturalium[1] :

« Unde Averroes dicit super XIo Metaphysicæ quod Astronomia vera fundatur super principia naturalia quæ destruunt epicyclos et excentricos, et tamen confitetur se non posse explicare hanc Astronomiam, sed tangit radices ut det occasionem sequentibus studiosis. Dicunt etiam omnes tam mathematici quam naturales quod duplex est modus salvandi apparentia, unus per excentricos et epicyclos, alius per motus orbis ejusdem secundum multa genera polorum, scilicet duo, tria et plura, ut sint motus compositi non simplices, sicut Averroes docet super XIo Metaphysicæ, ubi dicit quod possibile est omnia salvari per hunc modum, nam quod difficilius est, scilitet longitudinem Lunæ majorera et minorem secundum visum a Terra, et aliarum planetarum, dicit esse possibile salvari. Et

  1. Fratris Rogeri Bacon Communia naturalium ; lib. II ; De cælestibus ; pars V, cap. XVII. Bibliothèque Mazarine, ms. no 3576, fol. 130, col. a. — Éd. Steele, pp. 443-444.