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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


xiie siècle, menaçait d’entraîner bon nombre de théologiens hors de l’orthodoxie ; désireuse de ramener les esprits au respect de la tradition, cette œuvre consistait surtout en un exposé des opinions tenues par les Pères de l’Eglise ; de là le titre de Livres des Sentences que son auteur lui donna ; cette œuvre devait, pendant tout le Moyen Âge, assurer la plus grande célébrité au Maître des Sentences.

Josse Clichtove pense que l’idée et le plan des Livres des Sentences furent suggérés à Pierre Lombard par le De fide orthodoxa de Saint Jean de Damas, dont la traduction venait d’être donnée. Mais, pour trouver un modèle, Pierre Lombard n’était pas obligé de l’aller chercher si loin ; il le rencontrait dans un ouvrage dont l’intention était la même que la sienne, et dont Fusage était classique au moment où il composa le sien ; nous voulons parler de la Summa Sententiarum d’Hugues de Saint Victor.

Né vraisemblablement aux environs d’Ypres, transporté, peu après sa naissance, dans une région de la Saxe voisine de la Lorraine, Hugues entra en 1118 à l’Abbaye de Saint-Victor à Paris ; en 1133, il fut chargé de diriger l’éoole célèbre de Philosophie et de Théologie qui se tenait dans cette abbaye ; il y mourut le 11 février 1141.

Au commencement du second traité de la Summa Sententiarum, traité qui est consacré à la création des anges, Hugues admet [1] l’existence d’un Empyrée, ciel suprême qui est le lieu où cette création fut faite.

Traitant ensuite de l’œuvre des six jours, Hugues de Saint Victor écrit [2] :

« Le second jour, le firmament fut fait, afin de diviser les eaux d’avec les eaux. Bède dit que le firmament est formé d’eaux consolidées et qu’il est semblable au cristal de roche ; cela est assez vraisemblable, car sa couleur indique qu’il en est ainsi. Certains commentateurs, cependant, veulent, semble-t-il, qu’il soit de nature ignée. Qu’il y ait des eaux au-dessus du firmament, nous le savons par la Genèse, et par le Prophète : Aquæ quæ super cælos sunt benedicite Domino (Ps. CXLVIII). Mais de quelle sorte sont ces eaux, nous ne le savons pas avec certitude. Les commentateurs disent ou bien qu’elles sont solidifiées sous forme

1. Hugovis dr S. Victore Summa, Sententiarum ; tract. II, cap. I (Patrologiçe latinœ accurante Migne, t. CLXXVI, col. 8i).

2. Hugonis de S. Victore Op. la ad., tract. III, cap. I ; éd. cit., col. 89. Le même passage se trouve textuellement reproduit dans : Hugonis de S. Victorb Adnotationes in Pentateuchon ; Cap. VI. De operibus sex dieruip distinctes (Patrologiœ latinœ, accurante Migne, t. CLXXV, col. 35).

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