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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


ralium, et que la similitude des sujets traités a pressé l’auteur ou le copiste d’accoler ce fragment à la dissertation extraite de l’Opus tertium.

Ce fragment nous semble, d’ailleurs, plus ancien que la belle dissertation de l’Opus tertium, dont il parait être jcomme un premier essai, encore incomplet. Dès lors, il semble assez naturel de croire qu’il provient du traité De cæleslibus que Bacon, nous en avons l’assurance, avait inséré dans l’Opus minus[1].

Le XVIIe chapitre de la cinquième partie du traité De cæleslibus que renferment les Communia naturalium est, nous l’avons dit, le premier chapitre du fragment que nous nous proposons d’étudier ; il commence en ces termes :[2]

« Bien qu’il se présente ici une autre difficulté (et licet ista habeant difficultatem aliam), ceux qui visent à détruire les épicycles et les excentriques disent qu’il vaut mieux sauver l’ordre de la Nature et contredire au jugement des sens, qui se trouve souvent en défaut, surtout par l’effet de la grande distance ; il vaut mieux, disent-ils, faire défaut dans la solution de quelque sophisme difficile que de faire sciemment des suppositions contraires à la Nature. Car Aristote dit que les sages sont parfois en défaut lorqu’il leur faut résoudre certaines subtilités de Physique. Aussi Averroès, commentant le XIe livre de la Métaphysique, dit-il que l’Astronomie véritable se fonde sur des principes vrais qui détruisent les épicycles et les excentriques ; et toutefois, il confesse qu’il ne pourrait développer cette Astronomie ; mais il en touche les racines, afin de donner aux gens studieux qui viendront après lui occasion de poursuivre cette recherche.

» En outre, tous, les mathématiciens aussi bien que les physiciens, reconnaissent qu’il y a deux manières de sauver les apparences ; l’une emploie les excentriques et les épicycles ; l’autre, un orbe unique qui se meut sur plusieurs sortes de pôles, deux, trois ou davantage, de telle façon que les mouvements des orbes ne soient pas des mouvements simples, mais des mouvements composés.

  1. M. A. G. Little pense que ce fragment n’appartenait pas à l’Opus minus, niais qu’il est un premier essai de rédaction de la discussion dont nous trouverons, en l’Opus tertium, la forme définitive. Cette hypothèse, aussi plausible que celle que nous avons émise, a, avec celle-ci, une conséquence commune ; elle place la rédaction de ce fragment entre celle de l’Opas ma jus et celle de l’Opus tertium (Bbitish Society of Franciscan Studies Vol. IV. Part of the Opus Tertium of Roger Bacon including a Fragment now Printed for the First Time. Edited by A. G. Little. Aberdeen : The University Press. 1912. Introduction, p. XXII). Cette conséquence est tout ce qui nous importe ici.
  2. Ms. cit., fol. 130, coll. a et b. Éd. Steele, pp. 443-444.