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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS

Ailleurs[1], nous le voyons reprendre l’objection de Robert Grosse-Teste contre le mouvement de précession des équinoxes admis par Hipparque et Ptolémée : « L’awzr du Soleil se déplacerait d’un mouvement semblable à celui des planètes, à savoir selon l’ordre des signes du Zodiaque, et en sens contraire du mouvement diurne. Mais cela ne peut être, car les régions habitables, au-dessus desquelles se trouve l’aux (apogée), deviendraient inhabitables dans la suite des temps, alors que l’opposé de l’aux viendrait se placer au-dessus d’elles ; et au contraire, les contrées inhabitables deviendraient habitables ; cela est absurde. Il faut donc admettre que l’aux se meut, il est vrai, par suite du mouvement du ciel des étoiles fixes, mais que ce mouvement n’est point celui qui vient d’être imaginé. Ce mouvement est celui qu’ont admis les Indiens et Thébit ; il consiste en un mouvement alternatif de descente et d’ascension des pôles du ciel des étoiles fixes, ou bien encore en deux petits mouvements circulaires que la tête du Bélier et la tête de la Balance du ciel des étoiles effectuent respectivement autour de la tête fixe du Bélier et de la tête fixe de la Balance, qui sont deux points du neuvième ciel. Par ce même mouvement, les têtes du Cancer et du Capricorne se meuvent alternativement en avant et en arrière, vers l’Orient, puis vers l’Occident, sur la circonférence de l’écliptique immobile. C’est ce qu’on voit dans le système imaginé par Thébit ; celui-ci, suivant les avis des Indiens, a complété, en cette partie, l’œuvre de Ptolémée. Tel est donc le mouvement que Thébit attribue à la huitième sphère. Azarchel, dans ses canons et dans ses tables, partage son avis, et aussi Albumasar, dans son livre Des grandes conjonctions ; tous les astronomes, aujourd’hui, en usent de même. Mais, de la sorte, ils attribuent à l’aux solaire un mouvement qui est alternativement direct et rétrograde ; il ne dépasse pas le signe des Gémeaux, en sorte qu’il ne fait pas le tour de la Terre et que Topposé de l’aux ne se trouve jamais au-dessus des régions actuellement habitables. »

  1. Rogeri Bacon Opus majus, édit. Jebb, pp. 120 ; éd. Bridges, vol. I, p. 192.