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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS


en sa faveur contre la théorie des excentriques et des épicycles n’y sont plus que des souvenirs.

Telle est, en résumé, l’histoire des doctrines astronomiques au sein de l’École franciscaine ; essayons de retracer en détail la suite de cette histoire.


II
ALEXANDRE DE HALES

C’est en étudiant la Somme d’Alexandre de Hales que nous verrons naître, dans l’Ordre de Saint François, les connaissances astronomiques.

Alexandre, élevé au monastère de Hales, dans le comté de Glocestcr, était déjà avancé en âge lorsqu’en 1222, il prit la bure de frère mineur ; il mourut en 1245. De l’homme et de la Somme théologique qui porte son nom, lisons ce que Roger Bacon écrivait en 1267[1] :

« Nous avons vu de nos yeux deux hommes qui ont écrit, et nous savons qu’ils n’ont jamais rien vu de ces sciences dont ils se vantent, qu’il ne les ont jamais ouï enseigner…

» L’un d’eux est mort, l’autre est vivant. Celui qui est mort, » — c’est Alexandre de Hales que Bacon entend désigner, — « fut un excellent homme, riche, archidiacre important et, en son temps, maître en Théologie. Lorsqu’il fut. entré dans l’Ordre des Frères Mineurs, il fut tout aussitôt le plus grand des Mineurs devant Dieu, non pas seulement à cause de ses louables qualités, mais pour les raisons que je viens de dire. En ce temps-là, l’Ordre des Mineurs était nouveau et le monde n’y prenait pas garde ; il a édifié le monde et relevé l’Ordre. Dès son entrée, les Frères le portèrent aux nues, lui conférèrent l’autorité en tout genre d’études et lui attribuèrent cette grande Somme, plus lourde qu’un cheval. Il ne l’avait pas faite ; elle avait été écrite par d’autres ; et cependant, par respect pour lui, on la mit sous son nom, on l’appela la Somme de frère Alexandre. L’eût-il faite en grande partie, qu’une chose n’en demeurerait pas moins vraie ; c’est qu’il n’a jamais ni ouï enseigner ni lu les Sciences naturelles et la Métaphysi-

  1. Fratris Rogeri Bacon Opus minus ; tertium peccatum studii Theologiæ. (Fr. Rogeri Bacon I. — Opus tertium. II. — Opus minus. III. — Compendium Philosophiæ. Edited by J. S. Brewer. London, 1859, pp. 320-327).