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L’ASTRONOMIE DES DOMINICAINS


aussi ce que dit Alfraganus. Celui-ci tient de celui-là que les étoiles fixes se meuvent, en sens contraire du firmament, d’un mouvement très lent, différent du mouvement diurne, et qui est d’un degré en cent ans.

» En outre, nous nous demanderons si les étoiles fixes ont des épicycles sur lesquels elles se meuvent.

» À la première question, nous devons répondre qu’il y a sur ce point deux opinions.

» Quelques-uns disent, avec le Philosophe, que les étoiles de la huitième sphère ne se meuvent d’aucun mouvement propre, qu’elles se meuvent seulement par accident, par l’effet du mouvement de leur orbe. »

Cette première opinion n’est pas conciliable avec les observations astronomiques.

« Aussi y a-t-il une autre thèse, qui est celle des mathématiciens, selon laquelle les étoiles fixes se meuvent de mouvement propre, en changeant de situation », et non pas simplement, donc, en tournant sur elles-mêmes.

« Mais les mathématiciens, à leur tour, sont divisés. Les uns, comme Ptolémée et ceux qui le suivent, disent qu’elles se meuvent seulement en longitude, de l’Occident vers l’Orient. D’autres, comme Thébith et ceux qui le suivent, prétendent qu’elles ont un mouvement en latitude qui les approche et les éloigne alternativement de l’écliptique[1]. Quelques-uns, enfin, s’accordent à la fois avec les premiers et avec les seconds, et disent que les étoiles se meuvent simultanément de ces deux mouvements ; c’est ce qu’Albert parait trouver exact.

» Au livre de l’Almageste, Ptolémée suppose que toutes les étoiles, ainsi que les auges des planètes, se meuvent sur les pôles du Zodiaque, à l’encontre du mouvement du firmament, [d’un degré en cent ans] ; comme un signe compte trente degrés, elles parcourent un signe en trois mille ans ; et comme il y a douze signes, il arrivera qu’en trente-six mille ans, les étoiles fixes achèveront de décrire leur cercle au firmament ; c’est là cette Grande Année dont les philosophes ont parlé. De là, Ptolémée a conclu[2] que l’auge du Soleil, qui se trouve à présent dans les signes septentrionaux du Zodiaque, arriverait un jour dans les méridionaux ; la région aujourd’hui inhabitée deviendra

  1. Le texte dit : 1’équateur.
  2. Ptolémée,qui croyait l’apogée solaire animé du seul mouvement diurne, ne professait pas cette opinion ; notre auteur ne l’emprunte pas à l’Almageste, mais au traité d’Al Fergani.