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L’ASTRONOMIE DES DOMINICAINS

» Mais maintenant qu’avec Ptolémée, nous supposons l’existence de dix sphères, nous assignerons le nombre des intelligences en partant de cette proposition que nous avons formulée : Les intelligences et les orbes sont les principes de l’existence des choses ; il faut donc que les différences qui se rencontrent dans l’existence et dans la vie de ces choses aient pour causes les différences des moteurs et les différences des mobiles.

» Or dans cette existence et dans cette vie, nous trouvons quatre différences : Tout d’abord, l’existence absolue (esse simplex) qui provient purement et simplement de l’essence ; en second lieu, l’existence déterminée par la matière ; puis celle qui consiste à être quelque chose de déterminé par la grandeur et la figure ; enfin l’existence déterminée par le mélange et la composition des qualités premières.

» La première de ces existences a pour cause le premier moteur ; il est, en effet, essence simple, et son mouvement est, de tous les mouvements, le plus simple ; partant, par sa substance et par son mouvement, il est cause de l’effet le plus simple, c’est-à-dire de l’existence même.

» La cause de la seconde existence, c’est le second moteur. Ce moteur est, tout d’abord, cause du mouvement d’Occident en Orient ; aussi son mobile a-t-il deux mouvements ; le mouvement d’Orient en Occident, causé dans tous les orbes inférieurs par le premier moteur qui se meuve lui-même, puis le mouvement causé par son propre moteur, mouvement qui se fait en sens contraire, d’Occident en Orient.

» Ces deux sphères sont au-dessus de la huitième sphère ; elles sont cachées à notre vue, comme nous le prouverons plus loin[1].

» Par suite de cette contrariété entre les mouvements, chacun des principes de la composition essentielle va au devant de l’autre ; en effet, la composition de l’essence (esse) avec la matière ne se ferait pas si l’un des principes composants n’était mû vers l’autre ; il est donc évident que, par sa substance et son mouvement, ce moteur est cause de cette seconde existence.

» Quant à la détermination que la grandeur et la figure vont conférer à ce composé, elle a pour cause le mobile dans lequel se concentrent les premières images, qui sont celles des constellations, et le moteur de ce mobile. Ce mobile, c’est le ciel des étoiles fixes ; aussi, de l’avis de tous les astronomes, est-ce là l’effet de ce ciel.

  1. Ulrich n’a pas tenu cette promesse.