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L’ASTRONOMIE DES SÉCULIERS


ment, l’orbe suprême « qui ne renferme rien en sa composition, si ce n’est la matière et la forme première, en sorte qu’il est le corps le plus simple » [1].

Le firmament ainsi produit a propagé sa lumière vers le centre de la masse matérielle ; cette lumière émanée du firmament a dilaté et raréfié les parties superficielles de la matière contenue dans le firmament, ce qui ne pouvait être sans que, par compensation, les parties profondes se condensassent. Si puissante était la lumière émanée du firmament que les parties superficielles ont été amenées au plus haut point de raréfaction que leur nature comportât. Ainsi a été séparé un second corps très parfait ; mais la lumière qui informe ce second orbe céleste n’est plus une lumière simple comme celle qui informe le premier orbe ; elle est plus complexe, car elle a déjà traversé le premier orbe ; Grosse-Teste la nomme une lumière redoublée.

De même, la lumière émise par la seconde sphère a formé une troisième sphère ; la lumière transmise par cette troisième sphère en a engendré une quatrième, et ainsi de suite. Par Faction de la lumière sont nées, de la matière première, treize sphères emboîtées les unes dans les autreS, qui sont les neuf sphères célestes et les quatre sphères des éléments ; chacune d’elles reçoit une lumière moins simple et moins puissante que celle dont a été imprégnée la sphère précédente ; chacune d’elles est donc plus complexe et plus dense que la précédente.

« Ce que nous venons de dire rend évidente l’intention de ceux qui disent que tout est un, par la perfection d’une lumière unique ; et cela rend également manifeste l’intention de ceux qui disent : la multiplicité des choses multiples provient de la diversité dans la propagation de cette même lumière.

» Les corps inférieurs participent à la forme des corps supérieurs ; et, par suite de cette participation que les corps inférieurs ont à la forme des corps supérieurs, la même vertu corporelle qui, par son mouvement, meut le corps supérieur, est aussi celle dont le corps inférieur recevra son mouvement.

» C’est pourquoi la vertu incorporelle d’une intelligence, voire de l’intelligence divine, meut de mouvement diurne la sphère première ou suprême ; elle meut aussi toutes les sphères célestes inférieures de ce même mouvement diurne ; mais plus est inférieur le rang d’une sphère, plus est faible le mouvement qu’elle reçoit ;

1. Ceci porte ia marque évidente de l’influence exercée sur la philosophie de Robert de Lincoln par les doctrines du Fons vitœ d’Avicébron (Ibn Gabriol), doctrines que nous étudierons plus tard.

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