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L’ASTRONOMIE DES SÉCULIERS


les sphères homocentriques requièrent, pour les mouvoir, au moins cinquante intelligences [1].

En outre, nous voyons que notre maître ès arts a pris une connaissance exacte du mouvement de précession des équinoxes. Il se plaît à en parler à plusieurs reprises.

Il en parle, une première fois, à propos de cette question [2] : L’intelligence qui meut un ciel est-elle, elle-même, mobile ? Il écrit à ce sujet : « Aristote dit que les moteurs des orbes inférieurs se meuvent par accident, c’est-à-dire par suite du mouvement du premier mobile. Or la huitième sphère a, au-dessus d’elle, une autre sphère, la neuvième, qui se meut également ; il semble donc que l’intelligence motrice [de la huitième sphère] soit mue par accident.

» Que la huitième sphère soit ainsi mue par suite du mouvement d’une sphère plus élevée, c’est prouvé par les astronomes et par d’autres. Le firmament, en effet, par mouvement propre, se meut d’un degré en cent ans ; mais, d’autre part, en un jour naturel, il se meut autour de la Terre, d’Orient en Occident, et cela non par mouvement propre, mais par mouvement d’entrainement ; le ciel des étoiles fixes, en effet, est entraîné par le mouvement de la neuvième sphère, et il entraîne avec lui tous les autres orbes ; c’est ce que nous aurons à expliquer plus à plein au second livre Du Ciel et du Monde.

Plus loin, Bacon a affaire à l’opinion, si favorablement reçue par Guillaume d’Auvergne, qui, au-dessus de tous les orbes mobiles, requiert un ciel immobile. Parmi les raisons qu’il énonce en faveur de cette opinion, il en est une qui nous semble bien digne d’intérêt, encore que présentée confusément ; elle reprend, en effet, une supposition que Proclus avait déjà faite [3], que Gampanus de Novare soutiendra bientôt : Ce ciel immobile est nécessaire à titre de lieu de l’Univers, de terme auquel se puissent rapporter tous les mouvements.

Voici ce qu’écrit Bacon à ce sujet [4] :

« Nous percevons le mouvement des planètes à l’aide d’un corps céleste qui se trouve au-dessus des orbes planétaires. Semblablement, donc, puisque nous percevons le mouvement du firmament

1. Ms. cit., fol. 72, col. b, à propos de cette question : ÿnueritar gualiter reduclt omnes motus ad unum motorem.

2. Quœritur de motore cœli conjuncto, cujusmodi est ùitellîgentia, an moueatur. Ms. cit, fol. 72, col. b.

3. Voir : Première partie, Ch. V, § XVI, t. I, pp. 34t-342-

4. Ms. cit., fol. 72, col. d et fol. 73, col. a, à propos de cette question : Quceritur an-possit esse aliquod corpus cceleste qtiod semper quiescat.

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