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L’ASTRONOMIE DES SÉCULIERS


elles se meuvent d’un degré en cent ans, tout en gardant des figures et des constellations invariables. »

L’auteur admet, pour les étoiles fixes, l’opinion d’Aristote, selon laquelle un astre n’a d’autre mouvement que celui de la sphère solide en laquelle il est serti. Il ne garde pas cette hypothèse pour les astres errants. « L’éther[1] qui compose les neuf sphères doit, il est vrai, être considéré comme une substance unie et continue qui est mue toute ensemble d’Orient en Occident » par le mouvement diurne. Mais il n’en est pas de même des planètes. « Le chemin de chaque planète dans le ciel[2] n’est pas un corps solide, une chose rigide en laquelle la planète soit mue ; bien au contraire, c’est par elle-même que la planète se meut dans l’éther. On dit que les planètes sont les unes au-dessous des autres par locution analogique ; on emploie ce terme dans la pensée que chacune d’elles est d’autant plus éloignée de la Terre qu’elle est plus légère, et d’autant plus déprimée au sein de l’éther qu’elle est plus lourde ». Nous voici bien loin des principes péripatéticiens rotatifs à la cinquième essence ; ces astres errants qui, selon qu’ils sont plus ou moins lourds, se tiennent plus ou moins bas au sein d’un éther fluide, nous rappellent les idées de Pline l’Ancien, et l’ouvrage que nous analysons en prend un caractère archaïque bien marqué ; on le devine contemporain des premiers rapprochements entre la vieille Astronomie du Moyen Âge et la Physique péripatéticienne ; celle-ci ne s’est pas encore entièrement substituée à celle-là.

L’objet que notre auteur se propose est tout semblable à celui qui a sollicité les efforts de l’Astronome marseillais dont l’œuvre a été précédemment étudiée. « Nous désirons, dit-il[3], aborder un livre des cours des planètes, c’est-à-dire des tables d’Astronomie ». « Il faut savoir, poursuit-il[4], quelle est la longitude de la ville sur laquelle ces tables sont fondées ». Ce renseignement, il va nous le donner[5] : « La ville sur laquelle ces tables sont fondées est Londres ; la longitude de Londres, à l’occident d’Arim, ville de l’Inde, est 57° ; sa latitude est 51° »[6].

C’est donc une introduction à des tables astronomiques, dressées pour le méridien de Londres, que nous avons sous les yeux.

  1. Ms. cit., fol. 60, col. d.
  2. Op. laud., cap. V : De notificatione quorundum terminorum supradictorum, et primo quid sit radix ; ms. cit., fol. 66, col. a.
  3. Op. laud., cap. IV : De tractatu Zodiaci ; ms. cit., fol. 65, col. d.
  4. Op. laud., loc. cit., ms. cit. ; fol. 66, col. a.
  5. Op. laud., cap. V ; ms. cit. ; fol. 67, col. c.
  6. Le copiste, qui a constamment altéré les nombres écrits en chiffres, a mis 19 et 15 au lieu de 57 et de 51.