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LE TRIBUT DES ARABES


que possèdent les cieux et les planètes lorsque, d’avance, ils annoncent l’avenir, et aussi lorsqu’ils tournent d’un mouvement invariable, ils ne l’ont point d’eux-mêmes, mais ils la tiennent de l’Esprit du Seigneur ; elle est en eux comme par la grâce de l’Esprit Saint ; de même, les planètes sont au nombre de sept afin que leur nombre nous rappelle que cette grâce est septiforme. Mais que ce que nous venons de dire de l’Âme du Ciel ou des planètes soit tenu pour suffisant ; revenons à ce que nous traitions auparavant ».

L’Esprit de Dieu communique aux cieux et aux planètes une double vertu, la vertu de poursuivre leur cours d’une manière invariable, et la vertu de présager les événements futurs. On ne séparait guère à Marseille, au xiie siècle, l’étude des effets produits par ces deux vertus ; si l’on suivait le cours des astres, c’était surtout en vue de prédire l’avenir ; on était, à la fois, astronome et astrologue, et l’on était astronome afin de pouvoir être astrologue.

Astronome, et des mieux informés de l’état de sa science, notre auteur l’était assurément ; ce qui va suivre nous le montrera ; mais il ne dédaignait pas l’Astrologie judiciaire, bien au contraire ; dans son Traité du cours des planètes, une longue digression[1], où les auteurs sacrés et les auteurs profanes sont, tour à tour, invoqués, est consacrée à établir la légitimité et la fécondité de cette doctrine ; dans un prochain chapitre, nous aurons occasion de mentionner les principes que formule, à cet égard, notre Marseillais.

Par l’influence que les astres exerçaient sur les jours critiques des maladies, par les circonstances favorables ou défavorables à telle ou telle médication que déterminait la configuration du ciel, l’objet de l’Astrologie était intimement uni à celui de la Médecine ; que l’auteur des tables de Marseille fut médecin en même temps qu’astrologue, on le soupçonnerait volontiers à voir le soin qu’il prend[2] de marquer l’utilité qu’a l’Astronomie pour le médecin et la compétence avec laquelle il cite Hippocrate et Galien.

Mais ce n’est ni l’astrologue ni le médecin qui nous intéressent ici, c’est l’astronome ; et, d’ailleurs, le Traité sur le cours des planètes est, essentiellement, une œuvre d’Astronomie.

Pourquoi cette œuvre fut-elle acccomplie ? L’auteur va nous le dire, en nous montrant à quels misérables traités les astronomes latins de son temps étaient forcés d’avoir recours.

  1. Ms. cit., fol. 112, col. a, à fol. 114, col. b.
  2. Ms. cit., fol. 113, col. d.