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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


d’autres passages de l’Introductoire, que notre « astrologien » reconnaissait, à Martianus Capella, une autorité toute particulière.

Il a certainement lu Martianus Capella et Pline ; vraisemblablement aussi, il sait ce que Saint Augustin, Macrobe et Saint Isidore de Séville ont dit à ce sujet ; mais on doit reconnaître qu’en exactitude et en clarté ; il passe de beaucoup ses modèles. En particulier, dans la dernière explication qu’il rapporte, nous reconnaissons celle de Pline ; mais à la pensée vague et fumeuse du Naturaliste s’est substituée une pensée précise et lumineuse ; cette pensée, nous le reconnaissons sans peine, a emprunté maint trait à Guillaume de Conches.

Selon cette explication, une planète monte ou descend sur son épicycle selon que le Soleil, en la desséchant, la rend plus légère, ou que, reprenant sa première humidité, elle devient plus lourde. Nous trouvons-là une application d’un principe qui pourrait se formuler ainsi : La hauteur plus ou mains grande qu’une planète atteint dans le ciel dépend de son degré de légèreté ; et cette légèreté est d’autant plus grande que l’astre contient moins d’eau.

De ce principe, nous trouvons plusieurs autres applications dans l’Introductoire d’Astronomie ; elles y sont généralement mises au compte d’Aristote.

Déjà, notre auteur, au sujet du mouvement des astres errants, nous a dit [1] :

« Aristotes… disoit que, tant cum il sunt plus haut, estoient-ils plus légier et plus isnel. »

De ce que cette phrase laisse entrevoir, nous lisons le développement au chapitre suivant [2] :

« De la demande comment chascuns planètes se tient en sa région.

» Et demandent aucun — porce que Martians dit, el commencement de se Astrologie, que li planète ont lor leus où ils corent et font lor cours d’un atemprement [3] de substance [4] — cornent et de quèle matire il sunt si atempré que chascun ne court ne plus haut ne plus bas, fors tant cum il doit et cum sa région comprent.

» À ce respondent einsi, cum Aristotes, que, en lor créations, mist li Griators tèle atemprance qu’il priât, en lor composition, principalement II élémenz, le feu et l’aive, et cist [5] orent principa-

1. Ms. cit., fol. 26. col. a.

2. Ms. cit., fol. 27, coll. a et b.

3. Atemprement = tempérament.

4. Martianus Capella (ï)e nuptîis Philoloffice et Mereurii, lib. VIB, 814) admet pleinement l’existence de la cinquième essence péripatéticienne ; l’opinion dont on va lire l’exposé n’est donc point sienne. 5. Cist = ceux-ci.

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