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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


malies ; ils sont rétrogrades ou stationnaires ». Et Saint Isidore citait les vers de Lucain.

D’une théorie qui expliquerait les stations et les rétrogradations des planètes à l’aide d’une force exercée par le Soleil sur ces astres, nous n’avons encore qu’une indication bien vague et bien fugitive. Ne la laissons pas, cependant, passer inaperçue, car elle est la graine infime d’où, quelque jour, naîtra un grand arbre. Les aspects compliqués que nous présente la marche des planètes sont dûs à ce que ces astres circulent autour du Soleil, et cette circulation a pour cause l’attraction exercée par le Soleil sur les astres errants ; telle est la vérité que l’œuvre de Newton fera luire à tous les yeux ; de cette vérité, les textes que nous venons de citer renferment comme un premier soupçon.

Les Anciens ignoraient si complètement les lois qui, relient une force au mouvement qu’elle produit, qu’il leur eût été impossible de développer ce germe de vérité ; un véritable essai d’explication dynamique du mouvement des planètes passait, et de beaucoup, les bornes de leur science. Aussi, ceux qui se souciaient d’Astronomie précise dédaignèrent-ils les indications que nous venons de rapporter ; ils se contentèrent de décomposer les mouvements apparents des astres en circulations uniformes, sans rechercher quelles forces pouvaient produire ces mouvements ; et d’ailleurs, pour beaucoup d’entre eux, cette recherche était oiseuse, et de telles forces n’auraient eu que faire ; c’est par sa nature même, au gré des Péripatéticiens et des Néo-platoniciens, que l’orbe céleste poursuivait sa rotation uniforme et éternelle ; pour eux, au delà de l’analyse cinématique qui réduisait les circulations des astres à de tels mouvements, il n’y avait à s’enquérir aucune explication dynamique.

Alors que l’exposition cinématique des mouvements célestes, œuvre d’Hipparque et de Ptolémée, n’était point encore révélée aux savants du Moyen Age, ceux-ci connaissaient les ouvrages où se laissait pressentir le désir d’une explication dynamique des anomalies planétaires ; avant l’An Mil, tous les textes que nous venons de citer étaient entre leurs mains, et ils les lisaient avidement ; il serait surprenant que la commune pensée dont ces textes donnaient des expressions diverses n’eût pas retenu l’attention de quelques-uns d’entre eux ; du moins savons-nous qu’elle a été accueillie avec faveur par l’Astrologue de Baudoin de Courtenay, fort ignorant de la science de son temps, mais écho fidèle de celle qui comptait au moins un siècle.

Il nous a, touchant le cours dea planètes, fait cette promesse :