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LE SYSTÈME D’HÉRACLIDE AU MOYEN ÂGE


que les astronomes d’alors ; nous l’entendons, en effet, nous dire [1] :

« Et voel premièrement commencier des paroles que Ptholemeus met ès prologue de son livre qui est apelez Almageste. »

Nous le prenons donc pour un familier de la Grande Syntaxe. Mais, tout aussitôt, nous reconnaissons que les paroles mises dans la bouche de « Ptholemeus » n’ont jamais été tenues par F Astronome de Péluse. Notre « astrologien » se donne à peu de frais, auprès des ignorants, un air d’érudition, en mettant sur le compte des auteurs illustres, de Ptolémée, d’Aristote, de Platon, des opinions qu’il tire d’auteurs moins célèbres ou de son propre fonds.

En vérité, du système astronomique de Ptolémée, l’astrologue de Baudoin de Gourtenay n’a presque aucune connaissance ; lorsqu’il veut s’instruire du mouvement des étoiles et des planètes, il lit les livres qu’on lisait à Chartres au milieu du xne siècle ; c’est à Pline, à Martianus Capella, à Macrobe, c’est aussi à leurs disciples chartrains, particulièrement à Guillaume de Conches, qu’il a demandé les théories exposées par « Le second livre, des planèles [2] ».

Voici, d’abord, ce qu’il nous faut penser des étoiles fixes et de leur mouvement [3] :

« Si a tèle différence entre les es toiles fermes et les planètes, que li planète ont I naturel movement, par quoi il vont contre le firmament, et I accidentel qui lor vient del embruiement [4] del firmament qui onvecques soi les porte, chascun jor, environ la terre. Les estoiles fermes ne ont, fors le movement qu’èles ont de ce qu’èles vont o [5] le firmament.

» Neporquant [6] il en est II opinions ; quar li un dient qu’èles ont autre propre mouvement que del firmament ; li autre dient qu’èles ne ont autre movement fors del firmament, o cui èles sunt portées environ la terre, et qu’èles sunt fîchiées en une partie del firmament, ne ne se poent movoir en autre partie.

» Mès la raison de nature naît encontre ceste opinion, quar, cum èles soient de nature de feu, il convient par raison qu’èles aient autre movement que del firmament. Quar bien apert qu’èles ne sunt mie fîchiées el firmament cum la préciose pierre en l’anel

1. Ms. cit., fol. 7, col. a.

2. Ms. cit, fol. 24, col d.

3. Ms. cit, , fol. 25, coll. a et b.

4. Embruiement = mouvement rapide et violent.

5. O = avec.

6. Neporquant = cependant.

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