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L’INITIATION DES BARBARES


pas moins clairement en évidence, puisque l’auteur connaît la précession des équinoxes, admet l’évaluation que Ptolémée a proposée pour la durée de ce phénomène, expose et rejette la supposition d’un mouvement d’accès et de recès à peu près dans les termes où Théon d’Alexandrie l’avait exposée et rejetée.

Le livre De natura rerum composé par Isidore de Séville, embrasse à très peu près les mêmes matières que les huit livres d’Aristote Sur le Ciel et Sur les météores, ou bien encore que le livre Des éléments que les Arabes composeront et attribueront au Stagirite. Il expose sommairement l’Astronomie, la Météorologie et la Géographie. Mais l’esprit qui inspire la rédaction de l’Évêque de Séville est tout différent de celui préside à la composition des traités grecs, latins ou arabes. À propos de chacun des objets que le Ciel et la Terre offrent à notre contemplation, le principal souci d’Isidore paraît être de citer toutes les allusions qu’y ont pu faire l’Écriture ou les Pères, de rapporter aussi des passages empruntés aux poètes et aux littérateurs du Paganisme, k quitte à restreindre extrêmement la place qu’il laisse aux considérations proprement scientifiques.

Nous aurons une idée de la méthode suivie par Isidore en traduisant ici le chapitre[1] qu’il intitule : Des sept planètes du ciel et de leurs révolutions.

« Saint Ambroise, dans son livre intitulé : Hexaemeron, s’exprime en ces termes : « Nous lisons dans David : Laudate eum cæli cælorum. » On peut discuter, en effet, la question de savoir s’il existe un seul ciel ou plusieurs cieux ; les uns affirment qu’il en existe un grand nombre, les autres nient qu’il y en ait plus d’un. Les philosophes ont introduit la considération de sept cieux du monde ; je veux parler des cieux planétaires ; ces cieux se meuvent du mouvement harmonieux qui convient à des globes ; ces philosophes regardent toutes choses comme connexes aux orbes de ces cieux ; les planètes sont supposées liées à ces cieux et comme insérées en eux ; elles marchent d’un mouvement rétrograde et sont emportées par un mouvement contraire à celui des autres étoiles. D’ailleurs, dans les livres de l’Église, nous lisons : Cæli cælorum, et l’Apôtre Paul eut conscience d’avoir été ravi jusqu’au troisième ciel. Mais que l’homme n’aille rien présumer, en sa témérité, du nombre des cieux ! Dieu ne les a pas créés informes et confus ; il les a distingués selon une certaine raison et un certain ordre. Il a marqué un ciel qu’une surface particu-

  1. Isidore de Séville, Op. laud., cap. XIII : De VII planetis caeli et eorum conversionibus.