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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

On trouverait difficilement, croyons-nous, plus parfait exemple de galimatias ; notre solitaire eût mieux fait de s’en tenir à la lecture du vénérable Bède.

Macrobe aura, comme Paul Diacre, une fâcheuse influence sur la connaissance des marées ; car, de ce phénomène, il a dit quelques mots qui seront, au xiiie siècle, gardés comme des oracles par nombre de Scolastiques.

Macrobe enseigne [1] que l’Océan forme deux zones, plus ou moins irrégulières, dont chacune entoure toute la terre ; l’une de ces zones suit à peu près le tracé de l’équateur ; l’autre passe par les deux pôles. Il suppose, sans le dire explicitement, que chacune de ces zones est parcourue par un courant. « Lorsqu’ils se mêlent l’un à l’autre, avec une très grande force et une prodigieuse impétuosité, ils se heurtent, l’un l’autre ; de ce choc des eaux, naît le flux fameux de l’Océan, ainsi que le reflux ; partout où, dans notre mer [Méditerrannée], on constate un flux et un reflux, qu’on les observe dans les détroits resserrés ou, peut-être, sur les rivages ouverts, ils proviennent de ces golfes de l’Océan, auxquels nous donnons le nom même d’Océan ; car l’eau de ces golfes pénètre dans notre mer. »

Ces quelques mots de Macrobe furent, comme tout ce qu’avait écrit cet auteur, avidement recueillis par divers Scolastiques ; de ce nombre fut, sans doute, Adélard de Bath.

Dans ses Disputes contre les Astrologues, Jean Pic de la Mirandole nous fait connaître ce qu’enseignait, au sujet des marées, un certain Adelandus [2]. Comme on ne connaît aucun Scolastique de ce nom, il faut, pensons-nous, lire Adelardus au lieu d’Adelandus, et rapporter à Adélard de Bath les indications données par Pic de la Mirandole.

Adélard de Bath, dont nous reparlerons plus longuement au prochain chapitre, avait, entre 1113 et 1133, composé des Quæstiones naturales ; c’est sans doute dans cet ouvrage qu’il parlait de la marée ; mais, bien que ces Questions aient été imprimées en 1484 [3], nous n’avons pu les consulter.

« Au sujet du flux et du reflux de la mer, se posent, dit Pic de

1. T. A. Macrobu Eæ Cicerone in Somnium Scipionis commentarius, lib. Il, cap. IX.

2. Ioannis Pici MtaANDüiÆ, Concokdiæ Comitis, Disputationum aduersus astroloffos lib. 111, cap. XV. (Ioannis Pici Mirandülæ Opéra omnia. Colophon : Disputationcs has Ioannis Pici Mirandülæ coricordiæ Comitis. litterarum principis,

3. Incipit proloyus Adelakdi Bathoniensis in suas questiones naturales per-

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