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CHAPITRE XIII
LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

I
LES PREMIÈRES CONNAISSANCES DES HELLÈNES SUR LE PHÉNOMÈNE DES MARÉES

Le lent mouvement qui déplace les étoiles fixes et les points équinoxiaux intéresse au plus haut degré l’astronome ; s’il n’en tenait un compte minutieux, il verrait, peu à peu, ses calculs faussés et ses prévisions déconcertées. Mais la petitesse de ce phénomène eût, sans doute, laissés indifférents la plupart de ceux qui ne s’appliquent pas spécialement à l’étude des astres, si, à ce mouvement très réel, les astrologues n’avaient rattaché un mouvement tout imaginaire, l’alternance des continents et des océans.

Si les Indiens et, après eux, les Arabes, ont pu, au mouvement de la sphère des étoiles fixes, attribuer le pouvoir de mettre peu à peu la mer à la place de la terre ferme et inversement, c’est, semble-t-il, parce que le mouvement de la Lune provoquait sous leurs yeux, chaque jour, un déplacement, moins ample, mais de même nature : le flux et le reflux de la mer. Si l’évidente influence de la Lune sur les marées n’a pas suggéré aux Indiens et aux Arabes l’hypothèse qu’ils ont émise, elle a, du moins, grandement contribué à accréditer cette hypothèse. À qui doutait de la soumission absolue de tous les changements sublunaires aux mouvements des sphères célestes, la mer n’opposait-elle pas un témoignage singulièrement convaincant, lorsqu’elle réglait ses