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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — II. LES SÉMITES

nes ; de tels mouvements peuvent rendre compte de la vitesse ou tic la lenteur des étoiles, de leur mouvement direct ou rétrograde, en un mot de toutes les apparences que Ptolémée n’a pu expliquer au moyen d’une Astronomie correcte… En réalité, l’Astronomie de notre temps n’existe pas ; elle convient au calcul mais ne s’accorde pas avec ce qui est. »

Averroès n’eut pas le loisir de reprendre la théorie des sphères homocentriques, ni d’appliquer à la représentation du cours des planètes cette sorte de mouvement qu’il nomme laulebia. « Dans ma jeunesse, j’espérais, dit-il[1] que cette recherche serait accomplie par moi-même ; parvenu déjà à la vieillesse, je ne l’espère plus ; mais peut-être que ces paroles inciteront quelqu’un à entreprendre cette étude. » Ce vœu d’Averroès devait être exaucé par son contemporain et condisciple Al Bitrogi.


V
MOÏSE MAÏMOMDE

« S’il fallait en croire Léon l’Africain, Moïse Maïmonide aurait été le disciple et même l’hôte d’Averroès jusqu’au moment de la disgrâce de ce dernier M. Munk a montré tout ce qu’il y a d’impossible dans ce récit. Lorsque Ibn Rochd fut proscrit, il y avait plus de trente ans que Maimonide avait quitté l’Espagne pour échapper à la persécution des Alhomades. Maïmonide dit bien dans le More Neboukim (II, 9) qu’il fut élève d’un élève d’Ibn Bâdja ; mais nulle part dans cet ouvrage il ne parie d’Ibn Rochd. Bien plus, nous avons la date précise à laquelle il commença à connaître les écrits du Commentateur, et cette date nous reporte aux dernières années de sa vie. Dans une lettre adressée du Caire, en l’année 1190-1191, à son disciple chéri Joseph ben Juda, il s’exprime ainsi : « J’ai reçu dans ces derniers temps tout ce qu’lbn Rochd a composé sur les ouvrages d’Aristote, excepté le livre Du sens et du sensible, et j’ai vu qu’il a rencontré le vrai avec une grande justesse ; mais, jusqu’à présent, je n’ai pas trouvé de loisir pour étudier ses écrits »… Maïmonide n’a pu davantage être l’élève d’Ibn Bàdja, comme le prétend Léon

  1. Averroès, loc. cit.