Page:Duhem - Le Système du Monde, tome I.djvu/473

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
465
L’ASTRONOMIE DES EXCENTRIQUES ET DES ÉPICYCLES

Pline place vers le milieu du signe du Lion l’apogée de l’excentrique de Mars ; Ptolémée trouvera[1] cet apogée à 25° 30′ du début du Cancer, partant à 4° 30′ avant le début du Lion.

Les écarts sont beaucoup plus considérables pour Vénus et pour Mercure. Pline met l’apogée de Vénus dans le Sagittaire, Ptolémée le mettra[2] à 25° du principe du Taureau ; la différence atteint presque la moitié de l’écliptique. Selon Pline, l’apogée de Mercure est vers le milieu du Capricorne ; Ptolémée estimera[3] qu’il se trouve à 10° et un quart du principe du Bélier ; l’écart est, à peu près, d’un angle droit.

Le Naturaliste ne nous laisse aucunement soupçonner le nom de l’astronome auquel il avait emprunté ces renseignements, qu’il transcrit, d’ailleurs, avec tant de concision et si peu d’intelligence.

Comme pour mieux affirmer ce défaut d’intelligence, Pline déclare que deux autres causes font varier la distance de chaque planète à la Terre.

La première de ces causes consiste, au dire du Naturaliste, en ce que les diverses planètes ont d’autres absides, correspondant à des distances à la Terre plus grandes que les autres, en des parties du zodiaque autres que celles dont on vient de parler ; ainsi, Saturne présente cet apogée d’un nouveau genre au vingtième degré de la Balance, Jupiter au quinzième degré du Cancer etc.

On comprendrait malaisément comment Pline pouvait concevoir la coexistence de ces deux sortes d’absides ; Jacques Milich, professeur à Wittemberg, qui, au xvie siècle, a donné un intéressant commentaire du second livre de l’Histoire naturelle, nous explique[4] la confusion dont Pline a été la naïve victime. Les astrologues attribuent à chaque planète une région du zodiaque où les influences de cette planète reçoivent comme un accroissement de puissance. Ces lieux privilégiés, les astrologues grecs les nomment ὑψώματα, les astrologues latins exaltationes ou altitudines. Ces dénominations ont induit en erreur le lecteur superficiel et peu compétent qu’était Pline.

  1. Claude Ptolémée, Op. laud., livre X, ch. VII ; éd. Halma, t. II, p. 231 et p. 237 ; éd. Heiberg, vol. II, I′, ζ′, p. 235.
  2. Claude Ptolémée, Op. laud., livre X, ch. I ; éd. Halma, t. II, p. 196 ; éd. Heiberg, vol. II, Θ′, α′, p. 299.
  3. Claude Ptolémée, Op. laud., livre IX, ch. VII ; éd. Halma, t. II, p. 168 ; éd. Heiberg, vol. II, Θ′, ζ′, p. 264.
  4. Liber secundus C. Plinii De mundi historia, cum Commentariis Jacobi Milichii professeris Mathematum in Schola Vitœbergensi, diligenter conscriptis et recognitis. Vitæbergæ Anno 1537. Halæ Suevorum ex Officina Petri Brubachii. Anno 1538. Mense Martio. Fol. 61, recto.