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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


nous transmet cet enseignement[1], que les apparences sont également sauvées soit que la planète parcoure un épicycle dont le centre décrit un déférent concentrique, soit qu’elle circule sur un excentrique mobile ; aussi déclare-t-il que, « pour les astres errants autres que le Soleil, la plus grande, la plus petite et la moyenne distances à la Terre, la plus grande, la plus petite et la moyenne vitesse peuvent se produire en n’importe quel lieu du zodiaque. »

Il n’en est plus de même si l’on complique la théorie du mouvement planétaire comme les géomètres avaient été amenés à le faire même avant le temps où vivait Hipparque.

Certains prédécesseurs du Bithynien, nous l’avons vu, avaient été amenés à faire circuler chaque planète sur un épicycle, tandis que le centre de cet épicycle décrivait un cercle déférent excentrique au Monde. La détermination de ce cercle déférent, invariablement placé par rapport aux étoiles fixes, donnait lieu à des problèmes semblables à ceux qu’avait posés l’étude de l’excentrique du Soleil. En particulier, elle exigeait que l’on déterminât l’orientation, par rapport aux étoiles fixes, de la ligne des absides du déférent, c’est-à-dire du diamètre de ce déférent qui passe par le centre du Monde.

Cette ligne marque, sur le déférent, le point où le centre de l’épicycle s’éloigne le plus de la Terre ; Ptolémée nomme ce point l’apogée de l’excentrique ; latinisant un mot que les Arabes avaient emprunté au sanscrit[2], les astronomes du Moyen-Âge l’ont appelé aux, mot qu’on est convenu de traduire par auge. La ligne des absides marque également, sur le déférent, le point où le centre de l’épicycle est le plus voisin de la Terre ; pour Ptolémée, ce point est le périgée de l’excentrique ; pour les astronomes du Moyen-Âge, il se nomme oppositum augis, l’opposé de l’auge.

Lorsqu’il se propose de constituer la théorie d’une planète, Ptolémée commence toujours par déterminer la direction qu’il convient d’attribuer à la ligne des absides du déférent excentrique ; la solution de ce problème est requise pour la résolution des autres questions qui doivent compléter cette théorie.

Or, ce problème fondamental, on s’en était préoccupé et on en avait donné une solution plus ou moins approchée avant l’an 79 de notre ère, où l’éruption du Vésuve fit périr Pline l’Ancien.

Au second livre de son Histoire naturelle, Pline l’Ancien expose

  1. Theonis Smyrnæi Liber de Astronomia, cap. XXX ; éd. Th. H. Martin, pp. 270-271 ; éd. J. Dupuis, pp. 284-285.
  2. Voir Chapitre XII, § IV.