Page:Duhem - Le Système du Monde, tome I.djvu/417

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
409
LES ASTRONOMIES HÉLIOCENTRIQUES

nir un instant noire attention, Chalcidius fait mouvoir le Soleil et les Planètes sur des épicycles, et il attribue cette opinion à Platon. Cette dernière affirmation est erronée, comme nous le verrons au Chapitre suivant ; jamais Platon n’a usé d’épicycles pour représenter le mouvement des astres errants. Mais Adraste et Théon avaient, eux aussi, admis que Platon usait de cette hypothèse.

Or, de même que Chalcidius se trompe en attribuant à Platon l’usage des épicycles, de même est-il permis de penser qu’il se trompe lorsqu’il nous dit qu’Héraclide du Pont faisait mouvoir le Soleil sur un épicycle dont le centre décrivait un cercle concentrique à la Terre ; la seconde erreur apparaît comme la conséquence naturelle de la première ; par elle, Chalcidius attribue à Héraclide une théorie du mouvement de Vénus et du Soleil qui est, en réalité, celle qu’ont professée Adraste d’Aphrodisias et Théon de Smyrne.

Il est probable qu’Héraclide s’est borné à imaginer la théorie plus simple que nous avons exposée ; Vénus, en décrivant son épicycle, ne tournait pas autour d’un centre géométrique, d’un point purement fictif, mais autour de la masse même du Soleil.

Héraclide étendait-il à Mercure la théorie qu’il avait proposée pour sauver le mouvement apparent de Vénus ? Chalcidius ne nous le dit pas, sans doute parce que cela allait de soi. L’analogie est frappante entre le mouvement de Mercure et celui de Vénus. Dans ses dialogues, et particulièrement au Timée, Platon ne sépare jamais ces deux planètes l’une de l’autre lorsqu’il raisonne sur les mouvements des astres errants. Au moment où il expose les vues d’Héraclide touchant le mouvement de Lucifer, Chalcidius vient d’analyser les opinions que Platon et ses commentateurs ont professées touchant Vénus et Mercure. Il lui suffisait, évidemment, de montrer comment le Paradoxologue sauvait les apparences présentées par le premier de ces astres pour que le lecteur eu conclût aussitôt la possibilité de sauver d’une manière semblable les apparences offertes par le second.

D’ailleurs, Adraste d’Aphrodisie, Théon de Smyrne et tous les auteurs qui, sans citer Héraclide du Pont, ont adhéré aux mêmes hypothèses que Chalcidius, ont toujours appliqué à la fois cet hypothèses à Vénus et à Mercure. Assurément, Héraclide avait fait de même.

Héraclide ou tel de ses disciples avait-il étendu des hypothèses semblables aux autres planètes ? Tout en faisant circuler le Soleil autour de la Terre, avait-il fait circuler Mars, Jupiter et Saturne sur des cercles dont le Soleil fût le centre, et dont le rayon fut