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LA DYNAMIQUE DES HELLÈNES APRÈS ARISTOTE

D’ailleurs, les trois dernières parties forment si bien un ouvrage distinct de la première, qu’au lieu de les trouver à la suite de cette première partie, on les trouve, parfois, à la suite des treize propositions de Jordanus.

De même que les Elementa Jordani semblent avoir eu pour objet d’établir la loi d’équilibre du levier droit et, par là, de servir d’introduction au De canonio, qui invoquait cette loi, de même, la première partie du Liber de ponderibus paraît surtout destinée à établir la condition d’équilibre du levier coudé, méconnue par Jordanus, et, par là, à préparer à la lecture du traité antique qui forme les trois dernières parties ; la loi d’équilibre du levier coudé est, en effet, employée dans ce traité.

Est-il possible de pousser plus loin et de nommer l’auteur grec de cet ouvrage ? Nous ne le croyons pas.

Thurot[1] qui a, le premier, attribué une origine hellénique au Liber de ponderibus, a émis la supposition qu’il était identique au traité Des poids, Περὶ ῥοπῶν, composé par Ptolémée et aujourd’hui perdu. Il ne nous paraît pas que cette supposition puisse être admise. Simplicius, en effet, connaissait le Περὶ ῥοπῶν de Ptolémée, qu’il cite[2] en son commentaire au Traité du Ciel d’Aristote ; il lui attribue des considérations que nous ne trouvons pas au Liber de ponderibus. Lorsque ce même Simplicius énumère, comme nous le dirons dans un instant, les diverses explications de la chute accélérée des graves qui ont été proposées dans l’Antiquité, il ne fait aucune mention de la curieuse hypothèse proposée par le Liber de ponderibus. Il ne connaissait donc pas cet ouvrage.

Nous n’en pouvons, dès lors, nommer l’auteur ; nous pouvons dire, seulement, qu’il connaissait les Questions mécaniques d’Aristote et, peut-être, l’Élévateur de Héron d’Alexandrie.

Comme les Questions mécaniques attribuées à Aristote, comme les Questions introduites par Vitruve au dixième livre de son Architecture, comme les Questions résolues par Héron d’Alexandrie dans son Élévateur, l’ouvrage qui nous occupe en ce moment est une suite de propositions assez peu ordonnées, dont quelques-unes sont évidemment inspirées des Questions mécaniques. Les deux premières parties sont exclusivement consacrées à la Statique. La dernière partie traite de problèmes fort divers que nous rapporterions aujourd’hui à la Dynamique, à l’Hydrostatique, à

  1. Ch. Thurot, Recherches historiques sur le principe d’Archimède (Revue Archéologique, nouvelle série, t. XIX, 1869, p. 117).
  2. Simplicii In Aristotelis de Cœlo commentaria. Edidit J. L. Heiberg ; lib. IV, cap. IV, p. 710.