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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


clairement en ne traitant des lieux propres des corps graves et légers qu’après avoir exposé la théorie générale du lieu.

Théophraste modifie la définition du lieu naturel de telle sorte qu’elle ne suppose pas l’éclaircissement préalable de la notion de lieu ; pour lui, chaque corps a la position qui lui est propre lorsque toutes les parties de l’Univers se sont disposées de la manière qui convient à la nature du Monde. Cette disposition-là est précisément le terme fixe auquel Damascius proposera de rapporter les positions adventices diverses des corps mobiles.

Le lieu essentiel, la disposition naturelle du Monde travaille donc à la perfection des corps à titre de cause finale de leurs mouvements naturels. Devons-nous croire qu’au gré de Damascius, le lieu travaille aussi d’une autre manière à la perfection de l’Univers, qu’il est cause efficiente des mouvements naturels, qu’il est doué d’un pouvoir actif et exerce sur les corps des forces capables de les conduire aux places qui leur sont propres ? Simplicius semble nous y inviter. Il nous dit[1], en effet, quelle admiration Damascius professait, en général, pour les doctrines de Jamblique ; il cite[2] la théorie du lieu proposée par Jamblique comme un avant-coureur de celle que Damascius a formulée ; il semble qu’il faille, de là, tirer cette conclusion : Comme Jamblique, Damascius attribuait au lieu le pouvoir d’exercer certaines forces sur les corps, d’agir sur eux à la façon dont, au dire des Stoïciens, le souffle agissait sur la matière.

  1. Simplicii Op. laud., lib. IV, corollarium de tempore : ; éd. cit., p. 795.
  2. Simplicii Op. laud., lib. IV, corollarium de loco : ; éd. cit., p. 639.