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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


σῶμα ἢ διάστημα ὁ τόπος, οὐδὲν ϰωλύεται ϰατὰ τόπον τὰ οὐράνια ϰινεῖσθαι. »

La position d’un corps peut changer, en effet, sans qu’aucun autre corps garde une position invariable, en sorte que le mouvement local ne suppose l’immobilité d’aucun corps. Là où il devient nécessaire de posséder un terme immobile, c’est lorsqu’on veut que ce changement de position nous devienne perceptible à l’aide du changement de certaines grandeurs géométriques ; qu’il n’existe aucun corps fixe, cela ne met aucun obstacle à la possibilité intrinsèque du mouvement local, mais cela nous empêche de reconnaître et de déterminer les changements de lien qui correspondent à ce mouvement. « Le Ciel[1] continuerait à tourner de la même manière lors même qu’il n’existerait ni orient ni occident ni méridien ; mais nous n’aurions aucun moyen d’en reconnaître les diverses positions. — Ἐι οὖν μήτε ἀνατολὴ μήτε δύσις εἴη μήτε μεσουράνημα ϰινηθήσεται μὲν ὁμοίως ὁ Ὀυρανός, ἡμεῖς δὲ τῶν διαφόρων θέσεων τεϰμήρια οὐχ ἕξομεν. »

Ce n’est pas que la doctrine de Damascius et de Simplicius ne reconnaisse un lieu fixe ; la disposition la meilleure que puisse affecter l’Univers est quelque chose de déterminé et d’immuable ; il en est de même de la mesure, de la définition géométrique de cette position, c’est-à-dire du lieu naturel de l’Univers.

« La définition[2] de la position essentielle du Tout demeure toujours la même, que l’Univers se meuve ou qu’il demeure en repos ; mais cette définition-là demeurant invariable, la multitude des autres positions incessamment variables qui se trouvent engendrées constitue une sorte de développement ; car la position essentielle unique de l’Univers contient toute position possible de cet Univers ; elle contient, de même, toute position de chacune des parties de l’Univers. — Ὁ γὰρ τοῦ ὅλου τῆς θέσεως οὐσιώδης ἀφορισμὸς ὁ αὐτὸς ἀεὶ μένει, ϰἂν ϰινῆται τὸ πᾶν ϰἂν ἑστήϰῃ · τοῦ δὲ μένοντος ἐϰείνου τὸ πλῆθος τῶν ἄλλοτε ἄλλων γινομένων θέσεων οἶον ἀνέλιξίς τίς ἐστι. Πᾶσαν γὰρ θέσιν τοῦ παντὸς ἡ μία ἡ οὐσιώδης περιέχει. Ὁμοίως δὲ ϰαὶ τῶν μορίων ἑϰάστου. »

Ce lieu immobile formé par la position qu’aurait l’Univers, par les positions qu’auraient chacune de ses parties, si le tout et les parties prenaient leur meilleure disposition, le caractère idéal en est admirablement décrit par Damascius dans ce passage que nous a gardé son disciple[3] :

  1. Simplicius, loc. cit. ; éd. cit., p. 634.
  2. Simplicius, loc. cit. ; éd. cit., p. 632.
  3. Simplicius, loc. cit. ; éd. cit., p. 645.