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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


pon. Ne voulait-on pas qu’il eût assisté, en 641, au sac d’Alexandrie ? Les attaques de Simplicius, cependant, eussent suffi à démontrer qu’il était beaucoup plus ancien. Mais M. Reichardt, poussant plus loin, a montré[1] que certains ouvrages de Jean le Grammairien étaient datés avec précision.

Jean Philipon avait commenté bon nombre d’ouvrages d’Aristote ; du commentaire sur les huit livres de la Physique, nous possédons les quatre premiers tout entiers et des fragments peu importants des quatre derniers. Or, au quatrième livre, lorsqu’il commence à parler du temps, le commentateur dit[2] : « Nous sommes maintenant en l’année 233 de l’ère de Dioclétien ». C’est donc en l’an 517 de Jésus-Christ que Philopon achevait son exposition du quatrième livre de la Physique.

Proclus avait écrit un traité où, par dix-huit arguments, il prétendait démontrer l’éternité du Monde : argument par argument, Philopon s’est attaché à réfuter le traité de Proclus. Or, en cette réfutation, on lit[3] : « De nos jours, en l’année 245 de Dioclétien, les sept astres errants se sont trouvés réunis dans la constellation du Taureau ». L’ouvrage a donc été composé peu après la 529e année de notre ère.

Enfin Jean Philopon a écrit un traité De la création du Monde, commentaire du récit de la Genèse ; ce traité est dédié à Sergius, patriarche d’Antioche ; or Sergius présida à l’église d’Antioche de 516 à 519 ; c’est donc durant cet intervalle de temps que fut composée l’exégèse de Jean le Grammairien[4].

Ce sont, surtout, les Commentaires sur la Physique d’Aristote qui nous diront les opinions professées par Philopon au sujet du lieu et du vide. Ces Commentaires ne sont, peut-être, d’ailleurs, que les reflets de l’enseignement donné à Jean le Grammairien par Ammonius, fils d’Hermias[5].

  1. Joannis Philoponi De opificio mundi libri VII. Recensuit Gualterus Reichardt. Lipsiæ, 1897. Præfatio ; a. De ætate.
  2. Joannis Philoponi In Aristotelis physicorum libros quinque posteriores commentaria. Edidit Hieronymus Vitelli. Berolini, 1888. In Aristotelis lib. IV, cap. X ; p. 703. Ce nombre 233 (σγλ′) est celui que portent les meilleurs manuscrits ; d’autres portent le nombre 333 (τγλ′), qu’ont reproduit toutes les anciennes éditions.
  3. Ioannes Grammaticus Philoponus Alexandrinus In Procli Diadochi duodeviginti argumenta de Mundi æternitate. Opus varia multiplicique Philosophiæ cognizione referti. Ioanne Mahotio Argentinœo interprete. Lugduni. 1557. In fine : Lugduni, excudebat Nicolaus Edoardus, Campanus, quinto idus lanuarias 1557. — Ad XVIm argumentum, art. IV, p. 264.
  4. G. Reichardt, loc. cit.
  5. Si toutefois le titre : Ἰωάννου Ἀλεξανδρέως τοῦ Φιλοπόνου εἰς τὸ περὶ φυσιϰῆς ἀϰροάσεως τοῦ Ἀριστοτέλους ἀποσημειώσεις ἐϰ τῶν συνουσιῶν τοῦ Ἀμμωνίου τοῦ