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LES THÉORIES DU TEMPS, DU LIEU ET DU VIDE APRÈS ARISTOTE


VIII
LA THÉORIE DU LIEU DANS L’ÉCOLE PÉRIPATÉTICIENNE

Après avoir rapidement esquissé les diverses théories du temps proposées par les successeurs d’Aristote, après avoir recueilli les nombreux témoignages de leur commune croyance à la Grande Année qui rythme la vie périodique de l’Univers, venons à ce que les écoles hellènes ont dit du lieu et du vide.

Les problèmes qu’Aristole a discutés touchant la nature et l’immobilité du lieu ont sollicité les méditations de bon nombre de philosophes grecs. Parmi ces penseurs, il en est dont les ouvrages sont venus jusqu’à nous ; il en est beaucoup aussi dont les écrits ont été perdus ; parfois, cependant, nous pouvons nous faire au moins une idée de leurs doctrines, grâce aux précieux commentaires de Simplicius ; cet auteur, en effet, non content d’exposer et de discuter les théories des philosophes qui l’ont précédé, prend soin, le plus souvent, de rapporter textuellement certains passages essentiels des livres qu’ils avaient composés ; c’est ce qu’il fait, en particulier, au cours de l’importante digression sur la théorie du lieu insérée[1] dans son commentaire au quatrième livre de la Physique d’Aristote.

L’ordre chronologique ne serait pas ici de mise ; nous chercherons, bien plutôt, à rapprocher les uns des autres les philosophes qui ont soutenu, au sujet du lieu, des doctrines analogues. Voici, d’abord, ceux qui demeurent, attachés à la notion du lieu telle qu’Aristote l’a définie ; ceux-là se bornent à commenter la pensée du Stagirite ; ils ne lui font subir que des modifications de détail ; au nombre de ces péripatéticiens fidèles, nous devons placer Alexandre d’Aphrodisias, qui vivait au iie siècle après Jésus-Christ, et Thémistius, qui enseignait au IVe siècle.

Les commentaires dont Alexandre d’Aphrodisias avait enrichi la Physique d’Aristote sont aujourd’hui perdus ; nous les connaissons seulement par les extraits et les discussions de Simplicius.

Les difficultés relatives au lieu de la huitième sphère et à son mouvement paraissent avoir tout particulièrement occupé Alexandre.

  1. Simplicii In Aristotelis physicorum libros quattuor priores commentaria, Edidit Hermannus Diels. Berolini, 1882, Livre IV ; corollarium de loco, pp. 601-645.