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CHAPITRE V
LES THÉORIES DU TEMPS, DU LIEU ET DU VIDE
APRÈS ARISTOTE

I
LA PHYSIQUE PÉRIPATÉTICIENNE APRÈS ARISTOTE


La Physique d’Aristote est l’un des plus étonnants systèmes que la raison humaine ait jamais construits : à toutes les questions que les Anciens avaient accoutumé de poser sur les cieux, sur leurs mouvements, sur les éléments, sur leurs transformations, elle donnait des réponses, les plus précises et les plus complètes qui eussent été formulées jusqu’alors, et toutes ces réponses, elle les coordonnait logiquement en une théorie auprès de laquelle toutes les doctrines précédentes semblaient de simples ébauches.

Qu’un tel système ait exercé sur les esprits la séduction puissante qu’éprouveront, au Moyen-Âge, la plupart des philosophes arabes ou chrétiens, on le comprend aisément. Plus volontiers, on serait surpris en constatant que les successeurs immédiats d’Aristote se sont montrés, en général, rebelles à cette influence ; en effet, s’ils ont employé, dans la construction de leurs propres doctrines, nombre de matériaux que le Stagirite avait taillés, ils n’ont presque rien gardé du plan suivant lequel ces matériaux avaient été, tout d’abord, assemblés.

Lorsqu’en 322, Aristote cessa d’enseigner, il mit à la tête du Lycée son disciple Théophraste ; autant qu’on en peut juger par ce qui nous est resté de ses ouvrages, Théophraste commença à