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LA PHYSIQUE D’ARISTOTE

mentera, afin de demeurer inversement proportionnelle à la résistance.

« Si le moteur[1] est A, le corps mû B, la longueur parcourue C et le temps employé à la parcourir D, alors une même puissance, savoir la puissance A, mouvra dans le même temps la moitié de B le long d’un parcours double de C ; elle la mouvra de la longueur C en un temps moitié moindre que D ; car la proportionnalité sera ainsi sauvegardée. — Ἐι δὴ, τὸ μὴν Α τὸ ϰινοῦν, τὸ δὲ Β τὸ ϰινοῦμενον· ὅσον δὲ ϰεϰίνηθαι μῆϰος, τὸ Γ· ἐν ὅσῳ δὲ ὁ χρόνος ἐφ οὐ Δ. Ἐν δὴ τῷ ἴσῳ χρόνῳ ἡ ἵση δύναμις ἡ ἐφ' ᾦ Α, τὸ ἢμισυ τοῦ Β διπλασίαν τοῦ Γ ϰινήσει. τήν δὲ τὸ Γ ἐν τῷ ἡμισει τοῦ Δ. Ὅυτο γὰρ ἀνάλογον ἔσται ».

Un autre texte[2], emprunté au Περὶ Οὐρανοῦ, va nous répéter que lorsqu’une même puissance est employée à mouvoir des poids qui lui résistent, les vitesses qu’elle leur communique sont en raison inverse des pesanteurs résistantes :

« Quelle que soit la puissance qui produit le mouvement, ce qui est moindre et plus léger reçoit d’une même puissance plus de mouvement… En effet, la vitesse du corps le moins lourd sera à la vitesse du corps le plus lourd comme le corps le plus lourd est au corps le moins lourd. — Ἐπεὶ γὰρ δύναμις τις ἡ ϰινοῦσα, τὸ δ' ἔλαττον ϰαὶ τὸ ϰουφότερον ὑπο τῆς αὐτῆς δυνάμεως πλεῖον ϰινηθήσεται… Τὸ γὰρ τάχος ἕξει τὸ τοῦ ἐλάττονος πρὸς τὸ τοῦ μείζονος ὡς τὸ μεῖζον σῶμα πρὸς ἔλαττον

Inversement proportionnelle à la grandeur de la résistance, la vitesse prise par le mobile est proportionnelle à la grandeur de la puissance ; en sorte que cette vitesse ne dépend que du rapport de la puissance à la résistance et qu’elle est proportionnelle à ce rapport ; c’est ce qu’Aristote formule en ces termes[3] :

« La moitié de la puissance fera faire à la moitié du corps mû le même chemin dans le même temps. Soient, en effet, E la moitié de la puissance A et Z la moitié du corps mû B. La puissance gardera le même rapport à la charge, en sorte qu’elle lui fera faire le même chemin dans le même temps. — Καὶ ἡ ἡμίσεια ἰσχὺς τὸ ἥμισυ ϰινήσει ἐν τῷ ἵσῳ χρόνῳ τὸ ἰσον· οἶον τῆς Α δυνάμεως ἔστω ἡμίσεια ἡ τὸ Ε, ϰαὶ τοῦ Β τὸ Ζ ἥμισυ· ὁμοίως δὴ ἔχουσι ϰαὶ ἀνάλογον ἡ ἰσχὺς πρὸς τὸ βαρύς, ὥστε τὸ ἴσον ἐν ἴσῳ ϰινήσουσι ».

La Dynamique d’Aristote était viciée par une contradiction interne ; tout en maintenant invariable la grandeur de la puis-

  1. Aristote, Physique, livre VII, ch. V (Aristotelis Opera, éd. Didot, t. II, p. 341 ; éd. Bekker, vol. I, p. 249, col. b et p. 250, col. a).
  2. Aristote, De Cœlo, livre III, ch. II (Aristotelis Opera, éd. Didot, t. II, p. 414 ; éd. Bekker, p. 301, col. b).
  3. Aristote, Physique, loc. cit.