Page:Duhem - Le Système du Monde, tome I.djvu/132

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
124
LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


que le Soleil n’éprouve pas, le système élaboré par Eudoxe ne rendait pas compte de l’anomalie indéniable qu’éprouvait la marche du Soleil suivant l’écliptique.

Ces désaccords, et bien d’autres qu’il serait trop long d’énumérer, devaient attirer l’attention des astronomes qui vinrent aussitôt après Eudoxe ; ils attirèrent, en particulier, celle de Calippe de Cyzique.

Polémarque de Cyzique était un des familiers d’Eudoxe[1] ; il s’occupait d’Astronomie, et Simplicius nous apprend[2] qu’il avait reconnu les changements de diamètre apparent du Soleil et de la Lune. Le même Simplicius nous dit[3] que Calippe de Cyzique fut condisciple de Polémarque, sans nous apprendre, d’ailleurs, si c’est à l’école d’Eudoxe qu’ils avaient étudié ensemble.

« Calippe, poursuit Simplicius[4] vint à Athènes, où il entretint un habituel commerce avec Aristote ; c’est avec Aristote qu’il entreprit de redresser et de compléter la théorie astronomique imaginée par Eudoxe. » Il fut conduit ainsi, comme nous l’allons voir, à joindre un certain nombre d’orbes sphériques à ceux qu’Eudoxe avait admis. « Mais il n’existe[5] aucun écrit de Calippe où celui-ci explique pour quelle raison ces sphères ont été ajoutées, et cette raison, Aristote ne l’expose pas davantage. Toutefois, Eudème nous conte brièvement quels sont les phénomènes en vue desquels il crut nécessaire d’introduire ces sphères nouvelles : il rapporte en effet que Calippe disait : Si les durées qui s’écoulent entre les solstices et les équinoxes sont aussi différentes les unes des autres que le pensent Euctémon et Méton, les trois sphères qui sont attribuées à chacun des deux astres (le Soleil et la Lune) ne suffisent pas, en ce qui les concerne, à sauver les apparences (σώζειν τὰ φαινόμενα), et cela en raison de l’anomalie qui se manifeste d’une manière évidente dans leurs mouvements apparents. »

Calippe avait reconnu clairement que le système d’Eudoxe ne pouvait rendre compte de l’inégalité des saisons ; avant de chercher à sauver cette anomalie, il voulut d’abord, selon les préceptes d’une saine méthode, en demander à l’observation une évaluation précise ; il reprit donc les déterminations qu’avaient faites Euctémon et Méton, et le Papyrus d’Eudoxe nous a fort heureusement conservé les durées qu’il fut ainsi conduit à donner aux

  1. Simplicius, loc. cit., éd Karsten, p. 221, col. a : éd. Heiberg, p. 493.
  2. Simplicius, loc. cit., éd Karsten, p. 226, col. a : éd. Heiberg, p. 505.
  3. Simplicius, loc. cit., éd Karsten, p. 221, col. a : éd. Heiberg, p. 493.
  4. Simplicius, ibid.
  5. Simplicius, loc. cit., éd Karsten, p. 223, col. a : éd. Heiberg, p. 497.