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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE


grossière, le moment où le Soleil atteignait chacun des solstices, chacun des équinoxes, on a dû reconnaître que les saisons étaient notablement inégales entre elles.

Cette inégalité des saisons était, alors que Platon écrivait, de notoriété commune auprès des Grecs. Selon l’Histoire astronomique d’Eudème, citée par Théon de Smyrne[1], Thalès reconnut le premier que « la marche périodique du Soleil par les solstices ne se faisait pas toujours dans le même temps », c’est-à-dire, à n’en pas douter, que le Soleil n’emplovait pas, pour aller du solstice d’hiver au solstice d’été, le même temps que pour revenir du solstice d’été au solstice d’hiver.

Au temps même de la naissance de Platon, en l’an 432, la durée des saisons avait été déterminée par Méton et par Euctémon. Les évaluations d’Euctémon nous sont connues par un précieux et célèbre papyrus, connu sous le nom de Papyrus d’Eudoxe ou de Didascalie de Leptine, et conservé au musée du Louvre ; ce papyrus contient de nombreuses données relatives au calendrier, les unes dues à Eudoxe, les autres à Méton et à Euctémon, d’autres encore à Calippe, disciple d’Eudoxe et ami d’Aristote, et à d’autres astronomes postérieurs[2].

Selon le Papyrus d’Eudoxe, voici quelles durées avaient, en l’an 432, les diverses saisons[3] :


Printemps 
 93 jours,
Été 
 90 jours,
Automne 
 90 jours,
Hiver 
 92 jours.
  1. Theonis Smyrnæi Liber de Astronomia, cap. XI ; éd. Th.-H. Martin, pp.324-325 ; éd. J. Dupuis, pp. 320-321.
  2. Sur le papyrus d’Eudoxe voir :

    Brunet de Presle, Notices et extraits de la Bibliothèque du Roi, vol. XVIII, 2e partie.

    A. Bœckh, Ueber die vierjährige Sonnenkreise der Alten, pp. 197-226.

    Letronne, Journal des savants, année 1839.

    Paul Tannery, Recherches sur l’histoire de l’Astronomie ancienne, Chap, I, § 25 et Appendice I : Traduction de la Didascalie céleste de Leptine (Art dEudoxe) (Mémoires de la Société des Sciences physiques et naturelles de Bordeaux. 4e sériet t. I. 1893 ; pp 23-25 et pp. 283-284)

    Brunet de Presle a donné a cet écrit le nom d’Art d’Eudoxe, traduction d’un anagramme des premiers mots. Letronne, qui l’a déchiffré le premier, l’intitulait Didascalie céleste de Leptine ; Paul Tannery a repris ce titre.

    Nos extraits du papyrus d’Eudoxe sont empruntés à G. Schiaparelli, Le sfere omocentriche di Eudosse, di Calippe e di Aristotele [Memorie del R. Instituto Lombardo di Scienze e Lettere. Classe di Scienze matematiche e naturali. Vol. XIII (série III. vol. IV) ; 1877, pp. 117-170] et à l’ouvrage ci-dessus cité de P. Tannery.

  3. G. Schiaparelli, loc. cit., p. 162, Paul Tannery, loc. cit., p. 294.