Page:Duhem - La Théorie physique, 1906.djvu/89

Cette page a été validée par deux contributeurs.
79
les théories représentatives et l’histoire

de faits primordiaux, dont les géomètres ne considèrent point la cause, mais qu’ils admettent comme résultant des observations communes et confirmées par toutes les expériences. »

Pas plus qu’Ampère ni que Fourier, Fresnel n’assigne comme but à la théorie l’explication métaphysique des apparences sensibles ; il voit en elle un puissant moyen d’invention, parce qu’elle est une représentation résumée et classée des connaissances expérimentales : « Il n’est pas inutile[1] de réunir les faits sous un même point de vue, en les rattachant à un petit nombre de principes généraux. C’est le moyen de saisir plus aisément les lois, et je pense que les efforts de ce genre peuvent contribuer, autant que les observations mêmes, à l’avancement de la science. »

Le rapide développement de la Thermodynamique, au milieu du xixe siècle, remit en faveur les suppositions que Descartes avait formulées le premier touchant la nature de la chaleur ; les opinions cartésiennes et atomistiques reçurent un regain de vitalité, et l’espoir de construire des théories physiques explicatives se ranima dans la pensée de plus d’un physicien.

Quelques-uns, cependant, des créateurs de la nouvelle doctrine, et non des moindres, ne se laissèrent point griser par cet espoir ; parmi eux, et au premier rang, il convient de citer Robert Mayer. « Quelle est la nature intime de la chaleur, écrivait Robert Mayer à Griesinger[2], quelle de l’électricité, etc., je n’en sais rien, pas plus que je connais la nature intime d’une

  1. A. Fresnel : Œuvres complètes, t. I, p. 480.
  2. Robert Mayer : Kleinere Schriften und Briefe, p. 181, Stuttgart, 1893.