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la structure de la théorie physique

tenaient pour l’explication des marées par l’attraction lunaire, explication qui n’impliquait point la rotation terrestre.

Parmi les plus bouillants adversaires du système de Copernic, il faut citer Morin, qui employait une égale ardeur à restaurer l’Astrologie judiciaire et à tirer des horoscopes. À l’écrit de Gassendi, où il croit voir une attaque personnelle, Morin riposte par un libelle intitulé : Alæ telliiris fractæ ; à la théorie de Galilée, il oppose en cet écrit la théorie aimantique des marées.

La différence de niveau entre la haute mer et la basse mer est très grande à l’époque de la pleine lune ou de la nouvelle lune ; elle est beaucoup plus faible lorsque la lune est au premier ou au dernier quartier. Cette alternance des vives-eaux et des mortes-eaux avait fort embarrassé jusque-là les philosophes aimantiques.

Morin en donne une explication qu’il tire, dit-il, des principes de l’Astrologie ; cette alternance s’explique par le concours du Soleil et de la Lune ; dans leurs conjonctions comme dans leurs oppositions, leurs forces sont dirigées suivant une même droite passant par la Terre, et c’est « un axiome vulgaire que les vertus unies sont plus fortes que les vertus dispersées ».

Morin se réclamait, pour affirmer le rôle joué par le Soleil dans les variations de marée, des principes de l’Astrologie judiciaire ; et c’est, en effet, l’honneur incontestable des astrologues d’avoir préparé de toutes pièces la théorie newtonienne des marées, tandis que les défenseurs des méthodes scientifiques rationnelles, péripatéticiens, copernicains, atomistes, cartésiens, en ont à l’envi combattu l’avènement.

Les principes invoqués par Morin étaient, d’ailleurs,